mardi 23 novembre 2021

L'abbé Raynal aux Etats-Généraux. A Marseille, 1789. Brochure révolutionnaire rare. "Une main amie a recueilli, dans mes ouvrages, tous les principes qui doivent concourir à l'édifice de la nouvelle Constitution."


[Anonyme] [Abbé RAYNAL].

L'abbé Raynal aux Etats-Généraux.

A Marseille, 1789 [avril 1789]

Brochure in-8 (22 x 14 cm) de (2)-64 pages. Couverture de l'époque en papier marbré. Non rogné. Couture sur simple ficelle. Très beau papier, très frais. En grande partie non coupé.


Edition originale ?

Il existe au moins deux autres tirages avec une page de titre légèrement différente (filets noirs ou fleuron). Il est difficile voire impossible de dire quel tirage a la priorité.

Notre exemplaire, qui porte en exergue "La liberté vient de Dieu, l'autorité, des hommes", est conforme a l'exemplaire conservé par la bibliothèque de l'Arsenal (Paris).

Cette brochure s'ouvre sur une Lettre adressée au Corps de la Bourgeoisie de la ville de Marseille, par M. l'abbé Raynal. Dans cette lettre, Raynal se justifie de refuser le droit de siéger aux Etats-Généraux du fait de son âge avancé et de son état de santé précaire. Raynal propose M. Bertrand, directeur principal de la Compagnie d'Afrique pour le remplacer : "Il soutiendra, avec l'assurance de la probité et du génie, la gloire et les intérêts de l'ancienne Marseille et de la Marseille moderne." Raynal écrit : "Ce qui me console de ne pouvoir plus servir la France qui m'a proscrit, c'est que je peux me flatter, sur le bord de ma tombe, d'avoir annoncé, précurseur de la raison, d'avoir préparé ses heureuses destinées. Puisse-t-elle oublier, comme moi, tout le mal qu'elle m'a fait, pour avoir pensé et parlé un peu trop tôt, lorsque les têtes, même celles des ministres, n'étaient pas mûres, lorsque le Parlement brûlait encore les livres !"




On ne sait pas qui a compilé ces extraits pris dans les ouvrages de l'abbé Raynal et que celui-ci nomme comme ses Cahiers (cahiers de doléances). Raynal écrit : "Une main amie a recueilli, dans mes ouvrages, tous les principes qui doivent concourir à l'édifice de la nouvelle Constitution."

On trouve à la suite de cette lettre un Discours au Roi. Viennent ensuite des articles sur le Gouvernement, la Politique, sur l'Asservissement des peuples, des Finances, sur les Impôts, sur la Justice, sur la Tolérance, sur les Corvées, sur l'Agriculture, Prêtres, sur le Célibat des des moines, l'Injustice des peuples sur les ministres.

L'abbé Raynal (1713-1796) est connu aujourd'hui pour son Histoire philosophique et politique des établissemens & du commerce des européens dans les deux Indes, paru en 1770, condamné en 1772, véritable encyclopédie de l’anticolonialisme au XVIIIe siècle, ouvrage abondamment documenté et prétexte à des réflexions sur la « loi naturelle » et des dénonciations du despotisme, du cléricalisme, de l'esclavage des noirs, et du colonialisme. Raynal fut forcé à s'exiler. Autorisé à revenir en France en 1784, mais interdit de séjour à Paris, il s’installa à Toulon, puis à Marseille. Seul philosophe survivant de la Révolution française, il dénonça les excès de ses disciples qui voyaient en lui un père fondateur. Dans sa Lettre à l’Assemblée nationale (la paternité de cette lettre est contestée par Raynal lui-même) adressée le 31 mai 1791 aurait écrit : « …j’ai parlé aux rois de leurs devoirs, souffrez qu’aujourd’hui je parle au peuple de ses erreurs ». Même sous la Terreur, son prestige et sa popularité furent tels que les révolutionnaires ne voulurent pas lui faire subir le même sort qu'à une partie des Brissotins en octobre 1793 ; ils préférèrent le dénigrer en l’accusant de sénilité. Pressenti pour siéger comme membre de l’Institut de France en 1795, quelques mois avant sa mort, il prétexta de son grand âge pour refuser cette promotion. Il mourut dans l'indifférence générale à Chaillot au n°1 de la rue des Batailles le 6 mars 1796, près de l'actuelle place d'Iéna.


Brochure rare.

Bel exemplaire tel que paru.

Prix : 700 euros