vendredi 13 décembre 2024

Rétif de la Bretonne [Restif de la Bretone]. [Paysanne pervertie]. La Paysane pervertie, ou les Dangers de la ville (1784). Bel exemplaire bien établi au milieu du XIXe siècle. Avec 31 figures d'après Binet (sur 38). De la bibliothèque de Bryan William James Hall


Nicolas-Edme Rétif de la Bretonne [Restif de la Bretone].

[Paysanne pervertie]. La Paysane pervertie, ou les Dangers de la ville ; Histoire d'Ursule R**, soeur d'Edmond, le Paysan, mise au jour d'après les véritables lettres des personnages : etc. Par l'auteur du Paysan perverti.

Imprimé à La Haie [La Haye], et se trouve à Paris chés la d.me Veuve Duchesne, libraire, 1784

8 parties en 4 volumes in-12 (17,2 x 10,5 cm | hauteur des marges : 167 mm) de 344, 320, 320 et 344-8-[clxix à ccxliv]-(12) pages. Avec 31 figures hors-texte (sur les 38 requises) dont 8 frontispices.

Reliure demi-veau marbré havane à petits coins, dos à faux-nerfs, filets dorés aux dos, plats de papier peigne, doublures et gardes de papier blanc, tranches rouges. Reliures fraîches exécutées vers 1860-1880. Il manque 7 gravures qui n'ont pas été reliées dans les volumes alors que quelques unes ont été ajoutées postérieurement à la reliure. Intérieur frais. Exemplaire grand de marges. Quelques légères marques et traces aux reliures.

Edition originale rare avec les premiers titres soumis à la censure (titres non censurés).

Exemplaire aevc 31 figures d'après Binet sur les 38 requises.

Exemplaire bien complet des pages additionnelles à la fin du tome IV (Revue des ouvrages de l'auteur et Aperçu des Contemporaines) y compris des 8 pages d'Avis sur la Paysanne pervertie.







Ouvrage composé en 30 jours par Rétif, dans le mois de septembre 1780, pour servir de suite et de complément à son Paysan perverti paru en 1776, la Paysane pervertie connut quelques déboires avec la censure qui ne lui permit pas de voir le jour avant 1784. "C'est l'ouvrage de prédilection de l'auteur qui a beaucoup plus pensé que le Paysan perverti" (Revue des ouvrages, p. ccxxxivj). La censure exigea que les titres fussent changés. De Paysane pervertie elle devient "Dangers de la ville" seulement (de nouveaux titres et faux-titres recollés sur les premiers émis). Rétif trembla tout 1785 de voir encore sa Paysane suspendue à chaque instant. Les exemplaires s'écoulèrent cependant. Aucune autre édition de la Paysane ne vit le jour (seules 2 contrefaçons circulèrent entre 1785 et 1786). Les 38 estampes de la Paysane étaient déjà achevées au mois de juin 1783 et annoncées au public au commencement de 1784. 2 figures (qui manquent souvent) n'ont été livrées qu'après la mise en vente de l'ouvrage (elles sont bien présentes dans notre exemplaire - figures III bis et VIII bis).

La Paysane pervertie a été imprimée à 3.000 exemplaires mis en vente par la Veuve Duchesne. Peu d'exemplaires portent encore le titre censuré de Paysane pervertie.









"La Paysane approfondit les caractères qui n'étaient qu'esquissés dans le Paysan : Fanchon, Pierre, Gaudet d'Arras surtout, y sont parfaitement achevés [...] Ces deux ouvrages, qui n'en sont réellement qu'un seul, sont peut-être la plus utile production qu'on ait mise au jour depuis le commencement du siècle." (Rétif de la Bretonne, Mes ouvrages, p. 34-35).

"Je n'ai jamais rencontré une nature aussi violemment sensuelle. Il est impossible de ne pas s'intéresser à la variété des personnages, des femmes surtout, qu'on voit passer sous ses yeux, et à ces nombreux tableaux caractéristiques qui peignent d'une manière si vivante les mœurs et les allures des Français de la classe populaire. Pour moi qui ai eu si peu l'occasion de penser au-dehors et d'étudier les hommes dans la vie réelle, cette oeuvre a une valeur inappréciable." (Schiller).

"Jamais écrivain ne posséda peut-être à un aussi haut degré que Rétif les qualités précieuses de l'imagination. " (Gérard de Nerval).

Références : Paul Lacroix, Rétif de la Bretonne, pp. 224-232 ; Rive-Childs, pp. 289-291



Provenance : de la bibliothèque de Bryan William James Hall avec son ex libris "Bryan W.-J.. Hall" (seconde moitié du XIXe siècle). The Halls are another of the old Jamaica families. William James Hall was the eldest son of James Hall of Hyde Hall. William James Hall was Auditor-General of the island of Jamaica (a least 2 ex libris - present in the Franks collection).










Le prix tient compte des gravures manquantes.

Bel exemplaire établi vers 1850-1870 avec 31 figures (sur les 38 requises).

Prix : 2.500 euros

jeudi 12 décembre 2024

LOUIS-FERDINAND CÉLINE | NORD. Roman | Nrf, Gallimard, 1960 (achevé d'imprimer le 13 mai 1960). Edition originale. 1/155 ex. vélin pur fil. Superbe exemplaire parfaitement établi en maroquin plein de qualité.


LOUIS-FERDINAND CÉLINE

NORD. Roman

Nrf, Gallimard, 1960 (achevé d'imprimer le 13 mai 1960)

1 volume in-8 (21 x 15,5 cm) de 461-(3) pages. La dernière page est l'achevé d'imprimer et les deux précédentes sont la carte.

Reliure plein maroquin noir, dos à quatre nerfs sautés, tête dorée, doublure et garde de papier marbré rouge et or, non rogné. Couverture (le premier plat et le dos) conservée en parfait état. Etui bordé de même maroquin doublé en suédine et recouvert du même papier que la doublure et les gardes de la reliure. La reliure n'est pas signée mais elle est de belle facture. Parfait état de l'ensemble. Quelques rousseurs claires sur les tranches et à quelques pages.


Edition originale.

Un des 155 exemplaires sur vélin pur fil Lafuma-Navarre, celui-ci numéroté au composteur (dont 5 hors-commerce).

Il a été tiré de l'édition originale 45 ex. sur vélin de Hollande van Gelder (dont 5 hors-commerce).

Nord est le deuxième volume de la trilogie autobiographique de Louis-Ferdinand Céline, précédé par D'un château l'autre et suivi par Rigodon (posthume). Ce roman s’inscrit dans le contexte de la Seconde Guerre mondiale, pendant lequel Céline raconte son exil en Allemagne après la débâcle de 1944 et avant son retour en France. L’œuvre narre les tribulations de Ferdinand (double littéraire de l’auteur) et de ses compagnons, dont sa femme Lucette et son chat Bébert, dans un paysage allemand dévasté. Céline décrit leur fuite désespérée pour échapper à la progression des Alliés. Au fil des pages, il dresse un portrait sombre et chaotique de l’Allemagne nazie sur le point de s’effondrer. À travers une succession de scènes souvent grotesques ou cruelles, Ferdinand croise des figures diverses : des officiers nazis désemparés, des civils allemands accablés, et des réfugiés essayant de survivre. L’ambiance générale est marquée par la peur, la faim et la désillusion. Céline, avec son style unique mêlant langage parlé, ironie et hyperboles, retranscrit l’effondrement d’un monde.



Lors de sa publication, Nord a reçu un accueil mitigé. D’un côté, les admirateurs de Céline louaient son talent stylistique unique. De l’autre, son passé controversé et ses prises de position antisémites continuaient de jeter une ombre sur son œuvre. Aujourd’hui encore, Nord suscite des débats : certains y voient un chef-d’œuvre de la littérature du XXe siècle, tandis que d’autres peinent à dissocier l’écrivain de l’homme. Dans Nord, Céline ne cherche pas à se présenter comme un héros ou une victime, mais comme un être humain ambigu, parfois lâche et souvent cynique. Ce refus d’idéalisation rend le personnage complexe et donne à l’œuvre une dimension tragique.

Nord est une œuvre marquante dans la bibliographie de Céline. Si elle est indissociable de son contexte historique et de la personnalité controversée de l’auteur, elle demeure un témoignage littéraire unique sur les horreurs de la guerre et la fragilité humaine. Le style inimitable de Céline continue d’interpeller et de diviser les lecteurs, témoignant de la puissance de son écriture.








Si le Voyage au bout de la nuit pose les bases de l’univers littéraire de Céline, Nord en approfondit et en exacerbe les thèmes. Le premier est une critique sociopolitique universelle portée par un certain recul, tandis que le second est un témoignage plus intime et désespéré, ancré dans une période précise. Ensemble, ces deux œuvres témoignent de la cohérence et de l’évolution de la pensée célinienne, tout en mettant en lumière la capacité unique de l’auteur à exprimer l’angoisse et l’absurde de l’existence humaine.

Après la Seconde Guerre mondiale, Céline avait été accusé de collaboration en raison de ses positions politiques et de son séjour dans l’Allemagne nazie. Bien qu’il ait été amnistié en 1951, son statut d’exilé revenu en disgrâce a continué de polariser l’opinion publique. La publication de Nord, qui relate son exil en Allemagne, a donc ravivé les tensions et suscité des débats sur la moralité de l’auteur.

C’est la première et seule édition précédant la condamnation du livre. Quelques semaines seulement après la parution du livre en mai 1960, le livre est retiré des librairies. Céline ayant laissé dans son manuscrit les noms propres des personnes côtoyées durant son exil, Mme Asta S. qui se reconnaît dans le personnage d’Isis et s’estime diffamée, écrit aux éditions Gallimard afin que la diffusion du roman soit interrompue. Elle joint la liste des passages du roman (quatorze) dans laquelle elle considère son honneur bafoué, Céline la décrivant en particulier comme la fille illégitime d'un père qui aurait abandonné sa mère et lui prêtant des amants. Après une double condamnation judiciaire de Gallimard et des héritiers de l’écrivain, une nouvelle édition dite "définitive" est donc publiée en octobre 1964, dans laquelle les noms propres sont remplacés. Entre-temps, le docteur H. qui se reconnaît dans le personnage de « Harras » tente en effet une action en justice en novembre 1964. Cette nouvelle édition est également amputée de la carte imprimée à la fin de l'édition originale. Il faut noter que les éditions actuelles sont conformes à cette édition « définitive » dans laquelle les noms propres ont été remplacés.

Nord le dernier roman publié du vivant de Louis-Ferdinand Céline. Après cette publication, Louis-Ferdinand Céline travaillait encore sur Rigodon, le troisième volet de sa trilogie autobiographique, mais il n'a pas eu le temps de le voir publié, puisqu'il est décédé le 1er juillet 1961.


Superbe exemplaire parfaitement établi en maroquin plein de qualité.

Prix : 4 500 euros

mercredi 11 décembre 2024

BRANTÔME (Pierre de Bourdeilles ou Bourdeille, dit) | Mémoires de Messire de Bourdeille, Seigneur de Brantome, contenans Les Vies des Dames illustres de France de son temps, Les Vies des Dames Galantes de son temps, Les Vies des Hommes Illustres et grands Capitaines étrangers de son temps, Les Vies des Hommes Illustres et grands Capitaines Français de son temps. Leyde, 1665-1666 | Ensemble 9 volumes. Parfait exemplaire relié en maroquin par Dupré. Bijou bibliophilique.


BRANTÔME (Pierre de Bourdeilles ou Bourdeille, dit)

Mémoires de Messire de Bourdeille, Seigneur de Brantome, contenans Les Vies des Dames illustres de France de son temps, Les Vies des Dames Galantes de son temps, Les Vies des Hommes Illustres et grands Capitaines étrangers de son temps, Les Vies des Hommes Illustres et grands Capitaines Français de son temps.

A Leyde, chez Jean Sambix le Jeune, à la Sphère, 1665 pour les Vies des Dames illustres (1 volume).

A Leyde, chez Jean de la Tourterelle, 1666 pour les Vies des Dames Galantes (2 volumes).

A Leyde, chez Jean Sambix le Jeune, à la Sphère, 1666 pour les Vies des Hommes illustres étrangers (2 volumes).

A Leyde, chez Jean Sambix le Jeune, à la Sphère, 1666 pour les Vies des Hommes illustres français (4 volumes).


Ensemble de 9 volumes petits in-12 (130 x 80 mm | Hauteur des marges : 125 mm) de (6)-407, (8)-344, 404, (8)-304, 300, (8)-417, (4)-404, (4)-442 et (2)-351-(1) pages. Collationné complet.

Reliure plein maroquin rouge vermillon signée Dupré (exécutée vers 1870-1880). Dos richement ornés aux petits fers dorés, triple-filet doré en encadrement des plats, double-filetd doré sur les coupes, large jeu de roulettes et filets dorés en encadrement intérieur des plats, doublures et gardes de papier peigne, tranches dorées sur marbrure. Etuis bordés de maroquin d'origine. L'ensemble en parfait état, proche du neuf. Intérieur parfait.


Tous les volumes portent l'adresse de Jean Sambix à Leyde à l'exception des 2 volumes des Dames Galantes qui portent le nom de Jean de la Tourterelle (Leyde). Ces deux volumes sortent d'autres presses que celles des autres volumes et le papier est plus fin mais l'impression est d'aussi belle qualité avec ornements.









Première édition, dite "Elzévirienne" même s'il n'est pas avéré qu'aucun des volumes n'est sorti des presses des Elzéviers à l'exception des Grands Capitaines français. La date de Leyde, ainsi que le nom de Jean Sambix, paraissent avoir été supposés. L'éditeur de 1740 assure que cette édition de 1665-1666 a paru à La Haye, chez les frères Steucker (libraires). D'après le libraire Edouard Rahir, les Vies des Dames illustres auraient été imprimées par François Foppens à Bruxelles. Selon Willems les volumes des Vies de grands Capitaines français sortiraient des presses de Daniel Elzévier d'Amsterdam. Les Vies des grands capitaines étrangers sortiraient également des presses de Foppens. Ces volumes figurent dans la liste des livres saisis par la police établie par Anne Sauvy (n°1063).

Montrésor aurait trouvé les manuscrits de Brantôme dans la bibliothèque de son château de Richemond. Il communiqua ces manuscrits et ils se répandirent rapidement en manuscrits et l'édition subreptice de Hollande fut publiée. Cette édition est peu exacte et incomplète. Mais cette édition est très bien imprimée et c'est cela qui la fait rechercher des amateurs car elle entre dans la collection des Elzéviers. Il existe deux tirages à la même date de 1666 pour les Dames Galantes, Jean Sambix ou Jean de la Tourterelle. Notre exemplaire est de ce dernier tirage. Il faudra attendre une nouvelle édition en 15 volumes publiée en 1740 pour avoir un corpus de texte plus complet et un peu plus exact bien qu'encore incorrects.





Pierre de Bourdeille, dit Brantôme (1540-1614), noble soldat français, s'était fait écrivain sans avoir rien publié de son vivant. Il rédige ses mémoires dans les dernières années de sa vie, après s'être retiré dans son château de Richemond, en Dordogne, en raison d’une blessure qui mit fin à sa carrière militaire. Ces mémoires témoignent de son expérience à la cour et sur les champs de bataille, mais aussi de son intérêt pour les anecdotes, souvent salaces, sur les personnages qu’il côtoyait. De nombreux passages scandaleux ou mettant en cause la personne de Brantôme ou l'entourage de la cour ne seront pas publiés. Ses Dames Galantes sont restés célèbres pour la liberté de ton qu'il y emploie. Il y débat des plaisirs du sexe, des femmes, des hommes, des cocus et autres manèges de l'amour à la cour des derniers Valois.

"Il n’est rien de plus naturel au monde que l’amour et ses plaisirs ; c’est une loi que la nature a mise en nous tous pour perpétuer notre race, et ceux qui s’en abstiennent vont contre elle. [...] "J’ai connu des dames qui aimaient tant les plaisirs de l’amour qu’elles eussent mieux voulu mourir que de s’en abstenir, disant que c’était le seul vrai paradis en ce monde."​ [...] "Il n’est chose plus douce ni plus agréable que d’être bien accompagné au lit, là où toutes les peines et soucis se noient dans les plaisirs."[...] "Les plaisirs de l’amour sont comme un bon festin : les mets variés y apportent plus de goût, et ainsi en va-t-il des amants ; il en faut changer pour que l’appétit dure." [...] "Une belle dame, interrogée sur ce qu’elle aimait le plus au monde, répondit : ‘Un homme vaillant et entreprenant, mais surtout bien instruit dans l’art d’aimer, car il n’est pire chose qu’un amant maladroit." (extraits des Dames Galantes).





Provenance : aucune marque d'appartenance

Références : Willems, les Elzévier, n°2010 ; n°1369

Nous avons ici l'un des plus désirables exemplaires qui soit.

Parfait exemplaire relié en maroquin par Dupré. Bijou bibliophilique.

Prix : 12 000 euros