samedi 12 octobre 2024

La Morale de Confucius, Philosophe de la Chine. Suivi de : Lettre sur la Morale de Confucius, Philosophe de la Chine. 1688. 2 ouvrages reliés en 1 volume petit in-8. Reliure strictement de l'époque plein veau fauve granité. Très rare première édition en français de la Morale de Confucius. Ce petit ouvrage est considéré comme le premier ouvrage à avoir introduit le confucianisme en France et plus généralement dans le monde occidental.



[Anonyme] [les Père Couplet, Herdtrich, Intorcetta et Rougemont] [Simon Foucher et, peut-être, le journaliste Jean de Labrune] [ China | Chine ]

La Morale de Confucius, Philosophe de la Chine.

A Amsterdam, chez Pierre Savouret; dans le Kalver-Straat, 1688

(20)-100 pages

Suivi de :

Lettre sur la Morale de Confucius, Philosophe de la Chine.

A Paris, chez Daniel Horthemels, rue S. Jacques, au Moecenas, 1688

(2)-29-(1) pages



2 ouvrages reliés en 1 volume petit in-8 (161 x 105 mm | hauteur de marges : 154 mm).

Reliure strictement de l'époque plein veau fauve granité, dos à nerds orné aux petits ders dorés, pièce de titre de maroquin rouge, tranches mouchetées de rouge, doublures et gardes de papier marbré. Reliure solide mais avec quelques usures et manques de cuir aux coiffes et coins, manque de cuir le long du mors sur le plat supérieur, cuir fendu aux mors. Reliure néanmoins solide qui mérite une restauration de qualité (exemplaire n'ayant subi aucune restauration à ce jour). Intérieur frais (légère mouillure sans gravité dans la marge intérieure supérieure de la fin du volume). Collationné complet. Sans le feuillet d'errata qui indique les fautes à corriger et qui aurait du se trouver après la page 100 (feuillet qui n'a jamais été relié dans notre volume). Les fautes indiquées sont présentes dans notre exemplaire.

Très rare première édition en français de la Morale de Confucius.




Ce petit ouvrage est considéré comme le premier ouvrage à avoir introduit le confucianisme en France et plus généralement dans le monde occidental.

En 1687 paraît à Paris le Confucius Sinarum philosophus des pères jésuites Couplet, Herdtrich, Intorcetta et Rougemont. Un gros in-folio, en latin. Une référence pour les intellectuels, mais peu pratique au grand public, qui peut avoir envie de découvrir à moindre frais Confucius en français. Deux traducteurs-compilateurs-commentateurs latin-français y travaillent, et éditent l'année suivante deux opuscules : le chanoine Simon Foucher et, peut-être, le journaliste Jean de Labrune. À moins que ce ne soit le président Cousin, dit-on. Ou le père Couplet lui-même, dit-on encore. Le nom de l'auteur aura semble-t-il moins d'importance que le fait de rendre Confucius et une idée de sa morale accessibles pour la première fois en français.











"On verra ici des essais de morale, qui sont des coups de maître. Tout y est solide, parce que la droite raison, cette vérité intérieure, qui est dans l'âme de tous les hommes, & que notre philosophe consultait sans cesse, sans préjugé, conduisait toutes ses paroles. Aussi les règles qu'il donne, & les devoirs auxquels il exhorte, sont tels, qu'il n'y a personne qui ne se sente d'abord porté à y donner son approbation. Il n'y a rien de faux dans ses raisonnements, rien d'extrême, nulle de ces subtilités épouvantables qu'on voit dans les traités de morale de la plupart des métaphysiciens d'aujourd'hui." (extrait)

"On peut juger combien le public est redevable aux pères Intorcetta & Couplet, jésuites, qui ont traduit, du chinois en latin, les trois livres de Confucius, dont nous avons tiré cette pièce de morale qu'on voit paraître. Nous avons choisi les choses les plus importantes, & en avons laissé plusieurs qui, quoique bonnes en elles-mêmes, & conformes surtout au génie des personnes pour qui elles ont été dites & écrites, auraient semblé, peut-être, trop vulgaires, & de peu de considération dans notre Europe. Et comme dans l'ouvrage des pères Intorcetta & Couplet, outre la morale de Confucius, il est parlé de l'origine de la nation chinoise & des livres les plus anciens qu'ait cette nation, & qui ont paru plusieurs siècles avant celui de Confucius, nous avons traduit sur ce sujet, ce qu'il est le plus nécessaire de savoir." (extrait)

Le volume s'ouvrage par un ample Avertissement de 18 pages.





"L'Ouvrage qu'on donne au Public, et où est contenue, en abrégé, toute la morale de Confucius, philosophe Chinois, est assez petit, si l'on regarde le nombre des pages qui le composent ; mais il est fort grand, sans doute, si l'on considère l'importance des choses qui y sont renfermées. On peut dire que la morale de ce philosophe est infiniment sublime, mais qu'elle est en même temps simple, sensible et puisée dans les plus pures sources de la raison naturelle. Assurément, jamais la raison destituée des lumières de la révélation divine n'a paru si développée, ni avec tant de force. Comme il n'y a aucun devoir dont Confucius ne parle, il n'y en a aucun qu'il outre. Il pousse bien sa morale, mais il ne la pousse pas plus loin qu'il ne faut, son jugement lui faisant connaître toujours jusqu'où il faut aller, et où il faut s'arrêter." (début de l'Avertissement)

L'ouvrage se divise ensuite en trois parties : Première partie : De l'Antiquité et de la Philosophie des Chinois. Seconde partie : Recueil des ouvrages de Confucius (Premier, Second et Troisième Livre de Confucius). Suivent des Maximes tirées des Livres de Confucius (LXXX maximes).

A la suite de ce premier ouvrage a été relié à l'époque la Lettre sur la Morale de Confucius donnée à l'adresse de Daniel Horthemels à Paris la même année 1688. On trouve à la fin la date du 23 janvier 1688 à Paris, signé des initiales imprimées S. F***. L'approbation est signée de Cousin et De la Reynie (mai 1688). La dernière page (verso de la page 29) contient un Avertissement du libraire qui explique pourquoi cette lettre est jointe à la Morale de Confucius nouvellement imprimée à Amsterdam.

"Le livre de Confucius contient tant de belles choses, qu'il en est comme d'un jardin où chacun peut cueillir des fleurs à son gré ; et si on s'avisait de disputer pour savoir si la Rose vaut mieux que l'Oeillet, on serait peut-être assez embarrassé à décider cette question." (Avertissement de la Lettre).

"Le grand secret, dit Confucius, pour acquérir la véritable science, la science, par conséquent, digne des princes & des personnages les plus illustres, c'est de cultiver & polir la raison, qui est un présent que nous avons reçu du ciel. La concupiscence l'a déréglée, il s'y est mêlé plusieurs impuretés. Ôtez-en donc ces impuretés afin qu'elle reprenne son premier lustre & ait toute sa perfection. C'est là le souverain bien. Ce n'est pas assez ; il faut, de plus, qu'un prince, par ses exhortations & par son propre exemple, fasse de son peuple comme un peuple nouveau. Enfin, après être parvenu, par de grands soins, à cette souveraine perfection, à ce souverain bien, il ne faut pas se relâcher ; c'est ici que la persévérance est absolument nécessaire." (extrait)

"Le présent que je vous fais ne saurait manquer de vous être agréable. Vous aimez les bonnes maximes de morale : en voici des meilleures & des plus solides. Si le lieu d'où elles viennent les pouvait rendre plus considérables, elles le seraient à cause de son éloignement. Ce sont des perles ou des pierres précieuses de la Chine, & quelque chose de plus grand prix, parce qu'il n'y a rien de comparable aux trésors de la sagesse, comme dit l'Écriture. Je pourrais dire la même chose à l'égard de leur antiquité, si la vérité n'était de tout temps, & si l'on pouvait penser que ces maximes, pour être plus anciennes, en fussent aussi plus véritables & plus solides." (Simon Foucher, extrait de la Lettre).

Le confucianisme, fondé par Confucius (né en 551 av. J.-C. et mort en 479 av. J.-C.) au VIe siècle av. J.-C., est une philosophie éthique et politique centrée sur l'harmonie sociale et la moralité. Il valorise des concepts tels que le « ren » (bienveillance) et le « li » (rites), qui guident les interactions humaines. La hiérarchie familiale et le respect des ancêtres sont au cœur de cette pensée, soulignant l'importance des relations interpersonnelles. Le confucianisme propose également une vision éducative, prônant l'apprentissage et l'autoculture comme moyens d'améliorer la société. Influent dans la culture asiatique, ses principes ont façonné des structures sociales et politiques pendant des siècles. Enfin, il cherche à établir une société juste par le biais de l'éthique individuelle et de la responsabilité civique. La figure mi-historique, mi-légendaire de Confucius est retracée dans sa première biographie issue de Shiji (史記 / 史记, Shǐjì), œuvre de l'historien chinois Sima Qian écrite de 109 à 91 av. J.-C., soit plus de quatre siècles après sa disparition.

Voici quelques citations inspirées de la pensée de Confucius, traduites en français : "Celui qui déplace une montagne commence par enlever de petites pierres." Cette citation souligne l'importance de commencer par de petites étapes pour réaliser de grands objectifs. "L'homme supérieur est celui qui ne cherche pas à obtenir des avantages personnels au détriment des autres." Elle met en avant la notion d'éthique et de responsabilité envers autrui. "Il ne suffit pas d'apprendre, il faut aussi appliquer ce que l'on a appris." Cette réflexion insiste sur l'importance de l'action dans l'apprentissage. "Le respect des ancêtres est le fondement de la moralité." Une citation qui rappelle l'importance de la famille et des traditions. "Ne fais pas aux autres ce que tu ne voudrais pas qu'on te fasse." Ce principe de réciprocité est au cœur de la morale confucéenne. Ces citations reflètent bien l'éthique et la sagesse de Confucius, axées sur la moralité, les relations humaines et l'apprentissage.

Très bon exemplaire de cet ouvrage important dans l'histoire de la diffusion du Confucianisme dans le monde occidental.

Accompagné de la Lettre parue à la même date, reliés ensemble à l'époque, réunion des plus rares.

Prix : 9.500 euros

jeudi 10 octobre 2024

OUDIN (R. P.) de l'Oratoire de Nantes | [Manuscrit] Principes de Poésie Française par le R. P Oudin de l'Oratoire de Nantes. Sans lieu ni date [vers 1769-1770] [Nantes ?]. 1 volume in-4. Reliure de l'époque pleine basane. Mise au propre sans ratures ou corrections, de toute évidence copiée par l'auteur pour sa bibliothèque, reliée et enrichie pour lui. Très intéressant et précieux témoignage sur le contenu de l'enseignement de la poésie dans la seconde moitié du XVIIIe siècle.


OUDIN (R. P.) de l'Oratoire de Nantes

[Manuscrit] Principes de Poésie Française par le R. P Oudin de l'Oratoire de Nantes

Sans lieu ni date [vers 1769-1770] [Nantes ?]

1 volume in-4 (23,5 x 18 cm) de 1 feuillet de titre manuscrit dans un encadrement gravé à l'eau-forte et rehaussé à l'aquarelle en couleurs à l'époque, 282 pages dont la table des matières in fine ( pp. [279-282] ), avec 13 portraits gravés à l'eau-forte ajoutés au moment de la reliure (poètes dont la liste est donnée ci-après).

Reliure pleine basane marbrée fauve, dos à nerfs orné, pièce de titre de maroquin rouge, tranches rouges. Quelques épidermures estompées et habiles restaurations aux coiffes. Bel exemplaire très frais. Belle écriture calligraphiée avec soin et parfaitement lisible.


Mise au propre sans ratures ou corrections, de toute évidence copiée par l'auteur pour sa bibliothèque, reliée et enrichie pour lui.

L'auteur a dressé la table des chapitres contenus dans ce traité de poésie : de la poésie en général | des études du poète | des talents du poète | comment le poète doit-il imiter ? | de la ressemblance et du merveilleux dans les fictions | de l'épopée | de la comédie | du poème didactique, des qualités du style poétique | de la tragédie | de l'invention | des talents du poète tragique | du prologue | de l'intrigue | du dénouement | ... | du style de la tragédie | de l'origine de la tragédie chez les grecs | de l'origine de la tragédie chez les romains | ... | de l'ode | du rondeau | du conte | du sonnet | de l'épigramme | etc.


Voici la liste des 13 portraits gravés reliés dans ce volume : Boileau | Corneille | Voltaire | Crébillon père | Racine | Sénèque | Rotrou | Fontenelle | La Bruyère | La Fontaine | Antoinette de La Garde, Madame Deshoulières | Jean-Baptiste Rousseau | Scarron


On sait très peu de choses de ce Monsieur Oudin, auteur de ce traité de Poésie. Le titre nous indique qu'il était de l'Oratoire de Nantes. Dans ses Notes sur l'enseignement au collège de l'Oratoire de Nantes, à la fin du XVIIIème siècle, Paul Jeulin précise que ce professeur se trouve indiqué comme chargé de cours pour les années 1769 et 1770. Il était très probablement professeur de rhétorique et d'autres matières puisque les professeurs changeaient régulièrement de matière au cours de leur passage au collège de l'Oratoire de Nantes.

Le collège de l'Oratoire de Nantes s'est installé en 1617 et forma une élite d'élèves jusqu'à la révolution française. Un de ses élèves parmi les plus renommés fut Joseph Fouché (1759-1820), célèbre ministre de la police sous le Directoire, le Consulat et l'Empire. Fils de marin, son père était Capitaine, de santé fragile, il abandonna la carrière de marin pour entrer au séminaire de l'Oratoire de Nantes où il reçoit les ordres mineurs. Les idées répandues chez les Oratoriens sont celles des Lumières, et il en ressort athée. Nous pouvons imaginer que Fouché a suivi ce cours sur les Principes de la Poésie par le père Oudin alors en poste à l'Oratoire de Nantes au même moment où Fouché y suit ses études.






Référence : Notes sur l'enseignement au collège de l'Oratoire de Nantes à la fin du XVIIIe siècle [article], Paul Jeulin, in Annales de Bretagne et des pays de l'Ouest Année 1930 39-1 pp. 31-41 ; A. Bachelier. — Essai sur l'Oratoire à Nantes au XVIIe et au XVIIIe siècles [compte-rendu]  Armand Rébillon in Annales de Bretagne et des pays de l'Ouest Année 1934 41-3-4 pp. 545-546.

Très intéressant et précieux témoignage sur le contenu de l'enseignement de la poésie dans la seconde moitié du XVIIIe siècle. Nous ne connaissons pas d'autre copie de ce Traité.







Bel exemplaire. Il s'agit très probablement de l'exemplaire de l'auteur, mis au propre pour lui, d'un cours qu'il professait durant les années 1769 et 1770 au Collège de l'Oratoire de Nantes.

Prix : 3.500 euros

lundi 7 octobre 2024

Discours sur l'Histoire Universelle à Monseigneur le Dauphin ; pour expliquer la suite de la Religion et les changements des Empires. Première partie. Depuis le commencement du Monde jusqu'à l'Empire de Charlemagne. Par Messire Jacques Bénigne Bossuet, Evêque de Condom, Conseiller du Roi en ses conseils, cy-devant Précepteur de Monseigneur le Dauphin, premier aumonier de Madame la Dauphine. A Paris, chez Sébastien Mabre-Cramoisy, imprimeur du roi, 1681. 1 volume in-4 (26 x 20 cm | hauteur des marges : 254 mm). Reliure plein maroquin chocolat janséniste signée Trautz-Bauzonnet. Exemplaire de la bibliothèque de l'éminent bibliophile parisien Eugène Paillet (1829-1901) avec sa signature autographe. Très bel exemplaire de l'édition originale.


BOSSUET (Jacques-Bénigne) | [Eugène Paillet, bibliophile]

Discours sur l'Histoire Universelle à Monseigneur le Dauphin ; pour expliquer la suite de la Religion et les changements des Empires. Première partie. Depuis le commencement du Monde jusqu'à l'Empire de Charlemagne. Par Messire Jacques Bénigne Bossuet, Evêque de Condom, Conseiller du Roi en ses conseils, cy-devant Précepteur de Monseigneur le Dauphin, premier aumonier de Madame la Dauphine.

A Paris, chez Sébastien Mabre-Cramoisy, imprimeur du roi, 1681

1 volume in-4 (26 x 20 cm | hauteur des marges : 254 mm) de (4)-561-(7) pages.

Reliure plein maroquin chocolat janséniste, dos à nerfs, double-filet doré sur les coupes, large jeu de roulettes et filets dorés en encadrement intérieur des plats, doublures et gardes de papier peigne, tranches dorées sur marbrure (reliure signée Trautz-Bauzonnet exécutée vers 1860-70). Reliure très fraîche. A noter une légère éraflure sur le plat supérieur, à peine visible. Intérieur parfait (exemplaire lavé et encollé par Trautz) sans rousseurs.

Edition originale.

Elle est ornée de la marque "aux cigognes" de l'imprimeur de Sébastien Mabre-Cramoisy, d'un bandeau d'en-tête représentant le temps au milieu des ruines et tenant les armes du Dauphin, gravé par Jollain, et d'une lettrine et d'un grand cul-de-lampe final non signé.


Exemplaire de la bibliothèque de l'éminent bibliophile parisien Eugène Paillet (1829-1901) avec sa signature autographe sur la garde blanche.


Ce superbe volume sort des presses du premier directeur de l'imprimerie royale du Louvre, Sébastien Mabre-Cramoisy.

Fidèle à la conception traditionnelle qui envisage l’histoire comme un répertoire d’enseignements destiné aux princes, ce texte a été élaboré par Bossuet alors qu’il agissait en tant que précepteur du dauphin Louis de France (1661-1711), fils de Louis XIV et de Marie-Thérèse d’Autriche. Inspiré par La Cité de Dieu de saint Augustin, le Discours (rédigé dès 1677) est structuré en treize chapitres et couvre « l’histoire universelle », comprenant l’Europe et le Moyen-Orient, depuis le récit biblique de la Création jusqu’au règne de Charlemagne. En plus de son aspect éducatif, la profondeur philosophique et les implications politiques de ce Discours en font une œuvre majeure de l’auteur, qui est surtout reconnu pour ses Oraisons funèbres. En 1681, année de la première publication du Discours, Bossuet, fraîchement nommé archevêque de Meaux après avoir terminé son préceptorat, est devenu l’une des figures les plus influentes de l’Église de France.



Le style de Bossuet, qui fait entrer ce texte parmi les textes majeurs de la littérature française, se caractérise par une grande éloquence et une rigueur intellectuelle, alliant des phrases élaborées à une clarté d'expression. Son utilisation de la rhétorique, des métaphores et des références bibliques confère à ses discours une profondeur émotionnelle et philosophique. Par ailleurs, il excelle dans l'art de persuader, visant à instruire et à élever moralement son auditoire.






L'ouvrage se divise en trois parties : « Les Époques », « La Suite de la religion » et « Les Empires ». La première partie relate les principaux événements qui se sont déroulés depuis la création du monde ; la deuxième partie décrit l'avènement du christianisme, préfiguré par Moïse, et la victoire de l'Église catholique ; la troisième partie s'attache à dépeindre la grandeur et la décadence des empires de l'Antiquité, finalement unifiés par l'Empire romain, lui-même diffuseur de l'Évangile. Le propos de l'auteur est apologétique en ce sens que l'histoire du genre humain depuis les origines jusqu'au règne de Charlemagne est envisagée comme une manifestation de la providence divine : pour Bossuet, l'histoire répond à un dessein de Dieu, qui y est intervenu afin de voir triompher le christianisme. S'adressant à son dédicataire qui est en même temps son élève, le Grand Dauphin, destiné à devenir le roi de France, l'auteur conclut : « Pendant que vous les verrez tomber [les empires] presque tous d’eux-mesmes, et que vous verrez la religion se soustenir par sa propre force, vous connoistrez aisément quelle est la solide grandeur, et où un homme sensé doit mettre son esperance. » Anne Régent-Susini voit dans le Discours sur l'histoire universelle une pédagogie d'ordre visuel qui met les événements en perspective, comme dans une représentation picturale, afin de faire apparaître les lignes du tableau. En cela, Bossuet entend aider le futur roi de France à se rapprocher du point de vue de Dieu.

Une suite à ce Discours était annoncée mais elle ne parut jamais. Bossuet meurt en 1704 sans l'avoir écrit. Une seconde édition au format in-12 paraît rapidement.

Le Dauphin, Louis de France, ne sera finalement jamais roi de France, étant mort à l'âge de 49 ans, avant son père, Louis XIV. Comme quoi, même avec un excellent précepteur, il ne faut préjuger de rien, la vie est imprévisible, la maîtrise du pouvoir incertaine, même pour les plus puissants.






Références : Tchémerzine, I, 842 ; Catalogue de la bibliothèque Eugène Paillet, Paris, Morgand, 1887, n°96 (notre exemplaire coté alors 400 francs or) ; Jules Le Petit, Bibliographie des principales éditions originales françaises, Paris, Quantin, 1888 (notre exemplaire est décrit).

Provenance : de la bibliothèque de l'éminent bibliophile parisien Eugène Paillet (1829-1901) et dont une partie des livres fut vendue à prix marqués par le libraire Damascène Morgand en 1887 (n°96 de ce catalogue). Le présent exemplaire était proposé au prix de 400 francs or et indiqué comme "Très bel exemplaire de l'édition originale". 400 francs or était alors une somme considérable. Avec la signature autographe d'Eugène Paillet en haut du premier feuillet blanc.

Très bel exemplaire de l'édition originale de ce texte majeur, grand de marges, luxueusement relié par Trautz-Bauzonnet pour le bibliophile Eugène Paillet.

Prix : 3.900 euros

mardi 1 octobre 2024

Les Avantures de Gil Blas de Santillane par Monsieur Le Sage. Nouvelle édition, avec des figures. A Amsterdam, chez Meynard Uytwerf, 1747. 4 volumes in-12. Reliure plein maroquin janséniste vert sombre (milieu XIXe siècle). Avec 32 figures sur cuivre différentes de celles de l'édition de Paris. De la bibliothèque du bibliophile Amédée Rigaud. Bel exemplaire relié sur brochure de cette jolie édition peu commune.


LESAGE ou LE SAGE (Alain-René)

Les Avantures de Gil Blas de Santillane par Monsieur Le Sage. Nouvelle édition, avec des figures.

A Amsterdam, chez Meynard Uytwerf, 1747

4 volumes in-12 (14,5 x 9 cm | hauteur des marges : 141 mm) de (16)-392, (8)-344, (14)-369 et (12)-370-(6) pages. Avec 32 figires hors-texte non signées. Collationné complet.

Reliure plein maroquin janséniste vert sombre, dos à nerfs, titre, tomaison et millésime dorés, filet doré sur les coupes, dentelle dorée en encadrement intérieur des plats, doublures et gardes de papier peigne, tête dorée, relié sur brochure (feuillets ébarbés non rognés). Reliure non signée dans le style de Duru (exécutée vers 1860-1870). Reliures fraîches avec seulement quelques très légères marques à peine visibles, intérieur parfaitement frais. Les estampes sont en excellent tirage. Les 6 dernières pages du quatrième volume sont un catalogue des livres du fonds du libraire et imprimeur Meynard Uytwerf à Amsterdam dans lequel on retrouve ce Gil Blas et de nombreux titres d'ouvrages français contrefaits.

Edition parue en Hollande la même année que l'édition définitive de Paris (chez les libraires associés, 1747).

Le texte est strictement identique à l'édition de Paris qui passe pour être l'édition définitive et la meilleure de ce texte classique.

Notre édition hollandaise est illustrée de 32 gravures sur cuivre qui sont cependant totalement différentes de celle de Paris (les sujets sont différents, le nombre des gravures est identique).











"Cette édition (celle de Paris, que la nôtre reprend mot à mot), devenue peu commune, présente de nombreuses corrections et des augmentations considérables de l'auteur, lesquelles ne forment pas moins d'une centaine de pages ; elle doit donc être regardée comme la première bonne édition du chef-d'oeuvre de Le Sage." (Brunet, III, 1006).

Si l'édition de Paris est considérée comme "belle et recherchée", celle-ci, imprimée en Hollande avec soins, enrichie de belles gravures inédites, ne devrait pas l'être moins. D'autant qu'on la rencontre moins souvent que celle de Paris qui se trouve dans presque toutes les bibliothèques classiques.

"Écrite par Lesage entre 1715 et 1735, l’Histoire de Gil Blas de Santillane raconte les aventures de Gil Blas, fils d’un écuyer et d’une femme de chambre, dans l’Espagne des années 1610-1640. Tour à tour bandit, prisonnier, apprenti-médecin, économe, acteur d’une troupe itinérante, le jeune homme devient serviteur de différents personnages et débute alors son ascension sociale : domestique de bourgeois, puis de nobles, intendant des puissants, il fait son apprentissage à la Cour, jusqu’à finir secrétaire du premier ministre espagnol. Rendu cynique, à l’image du pouvoir qu’il côtoie, il se change en manipulateur corrompu, avant de connaître la disgrâce, puis de nouveau les faveurs du trône. Anobli, il termine retiré sur ses terres avec femme et enfants." (in Essentiels Bnf, en ligne)








L’Histoire de Gil Blas de Santillane est un roman d'inspiration picaresque, paru entre 1715 et 1735. L'auteur s'inspire du modèle picaresque mais le détourne, dans la mesure où son héros, Gil Blas, s'élève au fur et à mesure de ses innombrables aventures dans l'échelle sociale (il s'enrichit et finit bien marié et père de famille), contrairement au picaro qui, lui, cherchant à changer de milieu, échoue toujours dans son ascension. Lesage joue également avec les références antiques, le découpage en douze livres rappelant par exemple les douze chants de l'Énéide. Le roman a occupé son auteur vingt ans durant, puisque les douze livres (subdivisés eux-mêmes en chapitres) qui le composent ont paru en trois temps: livres I à VI en 1715 (en deux tomes); VII à IX en 1724 (tome III) et X à XII en 1735 (tome IV). La filiation de Gil Blas avec Turcaret, la pièce à succès composée par Lesage en 1709, est évidente : une fois de plus, Lesage met en scène non seulement des valets fripons servant des maîtres voleurs, des femmes de mœurs légères, des maris trompés et contents, mais aussi les pédants gourmés, les poètes ridicules, les faux savants, les médecins ignorants qui commettent des homicides. Chaque classe, chaque profession se résume à des types et chacun de ces types se peint lui-même dans l’action. Le choix des traits est inspiré par un goût parfait et ils sont mis en œuvre avec autant de sobriété que de finesse. Une caractéristique du récit de Gil Blas est l’accent de vérité qui l'imprègne d’un bout à l’autre. Quelque invraisemblables que soient ses aventures, le héros en parle, non comme d’une fiction, mais comme d’une réalité dont il a joui ou souffert. Il a vécu avec tous ces personnages et fait vivre le lecteur avec eux. Ils ont beau être de leur pays, de leur temps, ils ont, pour toutes les nations, une vie immortelle.

Cette œuvre, à la fois si universelle et si française dans son cadre espagnol, ne fut pas adoptée sans conteste comme une production originale. Lesage avait fait trop d’emprunts jusque-là à l’Espagne pour ne pas être soupçonné d’avoir pris Gil Blas à la même source. Voltaire fut l’un des premiers à l’accuser de plagiat et à signaler comme modèle de Gil Blas un roman de l'écrivain espagnol Vicente Gomez Martinez-Espinel (1550-1624) intitulé Vie et aventures de l'écuyer Marcos de Obregon, auquel Lesage avait fait, comme à tant d’autres romanciers espagnols, des emprunts de détail qui n’ont jamais diminué le caractère d’originalité d’une grande composition littéraire. La thèse de l’origine espagnole du Gil Blas fut plusieurs fois reprise par eux. Le Père Jose de Isla, en traduisant l’ouvrage de Lesage en espagnol, affirma le restituer à sa patrie et à sa langue. Faute de faits, l'inquisiteur et historien espagnol Juan Antonio Llorente (1756-1823) invoqua des preuves de sentiment en affirmant que Gil Blas devait être de l’historien espagnol Antonio de Solis y Ribadeneyra (1610-1686), par cette raison qu’à l’époque où il a paru, aucun autre écrivain n’eût été capable d’écrire un pareil ouvrage.

Il est désormais reconnu que l'on ne peut accuser d'emprunt l'œuvre inoubliable de Lesage, ultime éclat du roman picaresque. Bien qu'il se soit inspiré de sources variées, Gil Blas reste une création unique et authentique. À travers les aventures d'un picaro plein d'astuce, l'auteur dresse, par le biais de rencontres de hasard, un tableau satirique de la société de son temps.

Provenance : de la bibliothèque d'Amédée Rigaud avec son ex libris, financier (agent de change) et bibliophile dont la belle bibliothèque (environ 1.500 ouvrages choisis) fut vendue à sa mort survenue en 1874 (Catalogue de la bibliothèque de monsieur Amédée Rigaud, Paris, Aubry, 1874, n° 657).

Bel exemplaire relié sur brochure de cette jolie édition peu commune.

Prix : 2.500 euros