[COLLECTIF : Gillot, Pierre Leroy, le poète humaniste Passerat, Florent Chrestien, Gilles Durant, Rapin et Pierre Pithou].
Satyre Ménippée de la vertu du Catholicon d'Espagne ; Et de la tenue des Etats de Paris. A laquelle est ajoutée un Discours sur l'interprétation du mot de Higuiero d'Infierno, et qui en est l'auteur. Plus le Regret sur la mort de l'Âne Ligueur d'une Damoiselle, qui mourut durant le Siège de Paris. Avec des remarques et explications des endroits difficiles.
A Rastibonne, chez Mathias Kerner, 1664 [Bruxelles, Foppens]
1 volume in-12 (137 x 80 mm | Hauteur des marges : 130 mm) de 8-336 pages. 2 figures hors-texte (L'Espagnol et le Charlatan lorrain) et 1 figure dépliante (procession de la Ligue).
Reliure strictement de l'époque plein maroquin caramel, dos à nerfs richement orné aux petits fers dorés, triple-filet doré en encadrement des plats, roulette dorée sur les coupes et en encadrement intérieur des plats, doublures et gardes de papier peigne, tranches dorées. Reliure fraîche très bien conservée. Intérieur frais. Petit manque angulaire au bas de la page de titre très loin du texte, quelques pâles rousseurs, impression sur beau papier.
Nouvelle édition.
"Première édition elzévirienne de cette date." (Morgand).
Edition illustrée de 3 gravures, ici en excellent tirage.
Ces trois figures semblent avoir été faites pour l'édition datée de 1677 (même éditeur, même format, même pagination). Elles ont parfois été ajoutées à ce premier tirage de 1664, ce qui est le cas ici. Dans notre cas cela permet de dater la reliure qui doit avoir été exécutée en 1677 ou quelques années plus tard (ce qui est conforté par le décor du dos du volume).
La figure dépliante de la Procession de la Ligue est particulièrement belle. Les deux autres figures ne sont pas moins curieuses.
"La Satyre Ménippée est l'un de ces textes dont la qualité littéraire autant que la teneur historique et politique ont assuré à la fois un extraordinaire succès contemporain et le passage à la postérité, au panthéon de la littérature." (Jean-Paul Barbier).
La Satyre Ménippée paraît pour la première fois en 1594. Elle rapporte de manière bouffonne les Etats de 1593. Elle a été rédigée par un groupe de bourgeois de Paris afin de célébrer la défaite de la Ligue. Parmi ces auteurs on retrouve les chanoines Gillot et Pierre Leroy, le poète humaniste Passerat, mais également Florent Chrestien, Gilles Durant, Rapin et Pierre Pithou. Les vers qu'on y trouve sont de Passerat et Rapin. La Harangue de M. d'Aubray est de Pierre Pithou. Le mot Ménippée dérive du philosophe antique Ménippe et désigne un parler burlesque sans ambages, mêlé de prose et de vers, développant un propos cynique. Cette manière ironique de s'exprimer sera utilisée bien plus tard par des auteurs tels que Voltaire. Sous des allures Rabelaisiennes, c'est toujours une éloquence au service de la vérité et de la raison qu'il faut discerner tout au long du volume.
"Depuis Rabelais, le génie gaulois n'avait rien produit de plus brûlant." (Yves Cazaux, Revue française d'histoire du livre, n°34, 1982, p. 3).
Il a été fait une édition presque identique portant la date de 1677 (même éditeur, même pagination, quelques infimes différences dans les ornements).
Les bibliographes donnent cette édition à Foppens de Bruxelles. Elle est annexée à la collection des Elzévier. Ce petit volume était très recherché des bibliophiles Elzéviriomanes du XIXe siècle. On trouve par exemple un exemplaire de cette édition de 1664 relié au milieu du XIXe siècle par Trautz-Bauzonnet et coté 400 francs or en mai 1876 (n°2369 du Bulletin Morgand et Fatout). A titre de comparaison la même édition reliée en vélin d'époque était coté 25 francs seulement (n°7211, Bulletin Morgand, novembre 1880). Après avoir vérifié l'intégralité du Bulletin Morgand de 1876 à 1904, nous n'y avons trouvé aucun exemplaire de cette édition relié à l'époque en maroquin (seulement un exemplaire relié par Bozérian et un autre relié par Derome, tous deux à l'extrême fin du XVIIIe s.). Les exemplaires de ces éditions 1664 et 1677 reliés en maroquin à l'époque sont d'une insigne rareté. Une librairie parisienne en proposait un exemplaire relié en maroquin noir assez semblable à notre exemplaire (édition de 1677 avec les figures) et très bien conservé (coté 3.500 euros en 2018).
Provenance : de la bibliothèque du comte J. de Lazerme, à Perpignan (avec ex libris et timbre sec). La famille Lazerme, connue depuis le xvie siècle au Pouget en Languedoc, s'installe à Perpignan au XVIIIe siècle. Pendant plusieurs générations, les Lazerme constituent de grands domaines fonciers en Roussillon, et au xixe siècle exercent des fonctions politiques dans le camp légitimiste, tout en accueillant chez eux les princes carlistes, ce qui leur vaut en 1876 un titre de comte. Au xxe siècle, Carlos de Lazerme est un poète, auteur de théâtre et d'essais, alors que son fils Jacques reçoit Pablo Picasso à Perpignan, qui exécute plusieurs portraits de la comtesse de Lazerme. Leur hôtel particulier à Perpignan est aujourd'hui le musée Hyacinthe-Rigaud. D'après l'ex libris notre bibliophile doit être Jacques de Lazerme (1909-1986). Quatrième comte (carliste) de Lazerme, fils de Carlos de Lazerme, né à Perpignan en 1909. Président de l'Automobile Club des Pyrénées-Orientales, il reçut Pablo Picasso entre 1953 et 1955. Dans les années 1970, il vendit l'hôtel particulier de sa famille à la ville de Perpignan, qui y installa en 1979 le Musée Hyacinthe Rigaud. Il est l'auteur de plusieurs travaux sur sa famille, dont des Notices sur la famille de Lazerme et le Roussillon, publiées sous le nom d'emprunt de Thomas Ferriol.
Très bel exemplaire de ce modèle des pamphlets politiques, ici en maroquin de l'époque, condition la plus rare et la plus recherchée.
Prix : 2.500 euros