lundi 15 octobre 2018

Victor Hugo. Les Orientales. Eugène Renduel, 1834. Bel exemplaire dans une jolie reliure romantique.


Victor Hugo

Les Orientales. Œuvres complètes de Victor Hugo. Poésie. III.

Paris, Eugène Renduel, 1834 [imprimerie de Plassan, rue de Vaugirard]

1 volume in-8 (21,3 x 13,3 cm) de 368 pages.

Reliure strictement de l'époque demi-veau aubergine, dos à quatre faux-nerfs décoré en long, grand fer rocaille au centre, filets et roulettes dorés aux extrémités, plats de papier marbré, gardes et doublures de papier moucheté. Légers frottements. Reliure très fraîche. Intérieur très frais malgré quelques rares rousseurs. Reliure non tomée, avec le nom de l'auteur en haut du dos et le titre "Les orientales" en pied.

Volume des "Orientales" seul, faisant partie de la première édition collective des œuvres de Victor Hugo publiée en 27 volumes entre 1832 et 1842.



Les Orientales ont paru pour la première fois en 1829 au format in-8 chez Gosselin. Cette première édition avait été tirée à 1.250 exemplaires en tout, répartis en 4 tranches fictives de 300 exemplaires environ.

"L'auteur de ce recueil n'est pas de ceux qui reconnaissent à la critique le droit de questionner le poète sur sa fantaisie, et de lui demander pourquoi il a choisi tel sujet, broyé telle couleur, cueilli à tel arbre, puisé à telle source. L'ouvrage est-il bon ou est-il mauvais ? Voilà tout le domaine de la critique. [...] A voir les choses d'un peu haut, il n'y a en poésie ni bons ni mauvais sujets, mais de bons et de mauvais poètes. D'ailleurs, tout est sujet ; tout relève de l'art ; tout à droit de cité en poésie. [...] L'art n'a que faire des lisières, des menottes, des bâillons ; il vous dit : Va ! et vous lâche dans ce grand jardin de poésie, où il n'y a pas de fruit défendu. L'espace et le temps sont au poète. Que le poète donc aille où il veut en faisant ce qui lui plaît : c'est la loi. Qu'il croie en Dieu ou aux dieux, à Pluton ou à Satan, à Canidie ou à Morgane, ou à rien ; qu'il acquitte le péage du Styx, qu'il soit du sabbat ; qu'il écrive en prose ou en vers, qu'il sculpte en marbre ou coule en bronze ; qu'il prenne pied dans tel siècle ou dans tel climat ; qu'il soit du midi, du nord, de l'occident, de l'orient ; qu'il soit antique ou moderne, que sa muse soit une Muse ou une fée, qu'elle se drape de la colocasia ou s'ajuste la cotte-hardie. C'est une merveille. Le poète est libre. [...] Si donc aujourd'hui quelqu'un lui demande à quoi bon ces Orientales ? qui a pu lui inspirer de s'aller promener en Orient pendant tout un volume ? que signifie ce livre inutile de pure poésie, jeté au milieu des préoccupations graves du public [...] il répondra qu'il n'en sais rien, que c'est une idée qui lui a pris ; et qui lui a pris d'une façon assez ridicule, l'été passé, en allant voir coucher le soleil. [...]" (extrait de la préface datée de janvier 1829).



CLAIR DE LUNE

La lune était sereine et jouait sur les flots.
La fenêtre enfin libre est ouverte à la brise,
La sultane regarde, et la mer qui se brise,
Là-bas, d’un flot d’argent brode les noirs îlots.

De ses doigts en vibrant s’échappe la guitare.
Elle écoute… Un bruit sourd frappe les sourds échos.
Est-ce un lourd vaisseau turc qui vient des eaux de Cos,
Battant l’archipel grec de sa rame tartare ?

Sont-ce des cormorans qui plongent tour à tour,
Et coupent l’eau, qui roule en perles sur leur aile ?
Est-ce un djinn qui là-haut siffle d’une voix grêle,
Et jette dans la mer les créneaux de la tour ?

Qui trouble ainsi les flots près du sérail des femmes ?
Ni le noir cormoran, sur la vague bercé,
Ni les pierres du mur, ni le bruit cadencé 
Du lourd vaisseau, rampant sur l’onde avec des rames.

Ce sont des sacs pesants, d’où partent des sanglots.
On verrait, en sondant la mer qui les promène,
Se mouvoir dans leurs flancs comme une forme humaine…
La lune était sereine et jouait sur les flots.

2 septembre 1828.



Bel exemplaire dans une remarquable reliure typique du style romantique.

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