[Nicolas-Edme Rétif de la Bretonne | Restif de la Bretone]
Ingénue Saxancour, ou La Femme séparée : Histoire propre à démontrer, combien il est dangereux pour les Filles, de se marier par entêtement, et avec précipitation, malgré leurs Parens : Ecrite par elle-même. [Première Partie | Seconde Partie | Troisième Parie].
A Liège, et se trouve à Paris, chés Maradan, Libraire, rue des Noyers, N°33. 1789
3 parties reliées en 2 volumes in-12 (17 x 10 cm) de 248, (4)-240 et (4)-260 pages.
Reliure strictement de l'époque demi-basane marron, dos lisses, pièces de titres de maroquin marron et tomaison sur fond noirci, plats recouverts de papier vert. Frottements d'usage sur les plats et sur les coupes, mors partiellement fendu en queue du premier volume (sans incidence sur la solidité de la reliure). Intérieur collationné complet. Les 4 feuillets non chiffrés "Prospectus pour les Provinciales" qui se trouvent normalement à la fin de la dernière partie n'ont ici pas été reliés. Mouillures claires et sans gravité au début du premier volume. Rousseurs éparses, plus marquées dans la deuxième moitié de la permière partie jusqu'au début de la seconde partie. Le deuxième volume (troisième partie) n'a pas de rousseurs ni taches marquées (quelques pâles mouillures claires). Petites déchirures marginales ou plis sans gravité.
Edition originale très rare.
Voici ce qu'écrit Rives-Childs à propos de l'histoire d'Ingénue Saxancour : "Ingénue fut commencée le 18 mars 1786 ; Restif y travaillait pendant les mois de juin et de juillet (Mes Inscripcions, p. 179, 186, 211-226). "Une des plus délicieuses connaissances que Restif ait faite dans sa vieillesse, était celle de Mlle Laruelle. Elle lui racontait son histoire et Restif rapportait une partie des horreurs avec son mari, sous le nom de M. Moresquin, dans son ouvrage. Restif le composait en amalgamant l'histoire de Mlle Laruelle avec celle de sa fille aînée, mariée au monstre, L'Echine. Ce fut à la prière de Mlle Laruelle, "cette adorable amie", qui lui rappelait Mme Parangon, qu'il imprimait Ingénue Saxancour. Ce livre consolait l'âme profondément ulcérée de Mlle Laruelle, morte à trente-deux ans, de la poitrine, à Villoison, entre les bras de ma fille aînée (car nous sommes soeurs, étant réunies dans le même livre de ton père, et y ayant tellement les mêmes aventures, que ton mari a crû se reconnaître dans le mien) ; je suis vengée, puisque le livre est vendu ; il a fait horreur, sous son éxécrable nom... je meurs contente ; et je dois cette satisfaction à mon ami votre père." Et elle expira." D'autre part, Restif décrit l'ouvrage comme la suit de la Femme infidèle. "Ma fille aînée, dit-il, y fait son histoire, depuis son enfance jusqu'à son mariage, et sa séparation d'avec l'exécrable L'Echine. Elle y raconte ses premières aventures ; elle rapporte une pièce de moi, initulée le Loup dans la bergerie, ou la Marchande de modes. Elle raconte ensuite ce qu'elle a eu à souffrir d'Agnès Lebègue (sa mère, épouse de Rétif). Mais quand elle en est parvenue à son mariage, ses récits font horreur. On sait déjà, et j'en ai convenu dans mon histoire, que toutes ces infamies n'appartiennent pas à l'Echine ; mais qu'elles sont un amalgame de celles commises sur une dame Moresquin, grande et superbe femme, et sur ma fille aînée. Cette dame (qui se faisait appeler Laruelle, et non Moresquin) avait été vendue, prostituée dans un mauvais lieu, etc. Ingénue, en vertu de la sage et sainte loi du divorce, a enfin divorcé, en 1794, d'avec le vil l'Echine, et s'est remariée au citoyen Vignon, avec lequel elle est tranquille." (Mes Ouvrages, p. 158-159.)"
Suivant Paul Lacroix, "cet ouvrage est le plus rare de tous ceux de Restif, soit que l'édition ait été détruite en bloc, soit que les exemplaires aient été recherchés systématiquement pour être détruits l'un après l'autre... L'édition entière a dû subir des retranchements.. et les pages 249-252 du tome III manquent presque toujours" (elles sont bien présentes dans notre exemplaire).
C'est seulement en octobre 1789 qu'Augé, dit L'Echine, eut connaissance de l'ouvrage, dans lequel il était mis au pilori ; il dénonça donc son beau-père et l'accusa d'être l'auteur d'Ingénue Saxancour, de la Femme infidèle, Dom Bougre et autres livres du même genre. Nous trouvons tout le procès y relatif consigné par Restif dans les Nuits de Paris (tome XV, p. 193-237).
"Le roman d'Ingénue Saxancour était une satisfaction morale et un plaisir de vengeance, que Restif avait voulu se donner ; car l'ouvrage, quoique imprimé, n'eut aucune espèce de publicité et demeura caché dans l'imprimerie de l'auteur." (Lacroix)
Références : Rives-Childs, n°XXXV, pp. 307-309 ; Lacroix, pp. 313-319
Bon exemplaire conservé dans sa première reliure de cette rareté bibliophilique.
Prix : 8.000 euros