TISSOT, (Docteur en médecine)
L'Onanisme, dissertation sur les maladies produites par la masturbation ; par Mr. Tissot, Doct. Med. de la Soc. R. de Londres, de l'Ac. Médic. Phys. de Basle, de la Soc. Econ. de Berne, et de celle de Phys. Expérim. de Roterdam. Neuvième édition originale, considérablement augmentée.
A Lausane, chez Franç. Grasset et Comp., 1788
1 volume in-12 (18,5 x 11 cm) broché de XX-266-(2) pages. Couverture de l'époque en papier gris. Titre à la plume au dos. Exemplaire tel que sorti de l'imprimerie, non rogné. Très frais. Quelques légères marques et traces à la couverture qui reste en excellent état.
Neuvième édition originale.
Cet ouvrage se décompose en sections et chapitres comme suit : Les Symptômes. Section. I. Tableau tiré des Ouvrages des Médecins. Sect. II. Observations communiquées, Sect. III. Tableau tiré de l’Onania, Sect. IV. Observations de l’Auteur, Sect. V. Suites de la masturbation chez les femmes, ARTICLE II Les Causes. Sect. VI. Importance de la liqueur séminale, Sect. VII. Examen des circonstances qui accompagnent l’émission, Sect. VIII. Causes de danger, particulières à la masturbation, ARTICLE III. La Curation. Sect. IX. Moyens de guérison proposés par les autres Médecins, Sect. X. Pratique de l’Auteur, L’air, Les aliments, Le sommeil, Les mouvements, Les évacuations, Les passions, Les remedes, ARTICLE IV. Maladies Analogues. Sect. XI. Les pollutions nocturnes, Digressions sur les maladies occasionnées par trop de semence, Sect. XII. Gonorrhée simple, Récapitulation et Conclusion.
"L’on a vu plus haut l’étroite union de l’ame & du corps ; l’on a compris combien le bien-être de la première influoit sur le second ; l’on a vu les sinistres effets de la tristesse ; ainsi il est presque inutile d’ajouter qu’on ne peut trop éviter toutes les sensations disgracieuses de l’ame, & qu’il est de la dernière conséquence de ne lui en procurer que d’agréables dans toutes les maladies, & sur-tout dans celles qui, comme la consomption dorsale, disposent par elles-mêmes à la tristesse, tristesse qui par un cercle vicieux les augmente considérablement. Mais, & c’est une des difficultés du traitement, souvent les malades se complaisent à ce symptôme de leur mal, & l’on ne peut pas les déterminer à faire des efforts pour le surmonter ; d’ailleurs il ne faut pas se faire illusion, & croire qu’il n’y a qu’à ordonner d’être gai, pour qu’on le devienne ; le rire ne se commande pas plus qu’il ne se défend, & l’on est aussi peu maître de s’empêcher d’être triste, que d’avoir un accès de fièvre, ou une rage de dents. Tout ce qu’on peut exiger des malades, c’est qu’ils se prêtent aux remèdes contre la tristesse, comme ils se prêteroient à d’autres ; ces remèdes sont moins la compagnie dans ce cas (nous avons vu qu’elle leur déplaisoit par des raisons particulières), que la variété des situations. Le changement continuel des objets forme une succession d’idées qui les distrait, & c’est ce qu’il leur faut. Rien n’est plus pernicieux aux personnes qui sont portées à se livrer à une seule idée que le désœuvrement & naction. Rien n’est sur-tout plus pernicieux à nos malades, & ils ne peuvent éviter avec trop de soin l’oisiveté & l’abandon à eux-mêmes. Les exercices champêtres, les travaux de la campagne les distraisent plus puissamment que bien d’autres. M. Lewis veut qu’on ne voie, s’il est possible, que des objets de son sexe ; Nam non ulla magis vires industria firmat Quàm venerem & cœci stimulos ayertere amoris. Virg. que les malades ne soient jamais absolument seuls ; qu’on ne les laisse point se livrer à leurs réflexions ; qu’on ne leur permette ni lecture, ni aucune occupation d’esprit ; ce sont autant de causes, dit-il, qui épuisent les esprits, & qui retardent la cure. Je ne penserois pas avec lui qu’on dût absolument leur interdire toute lecture. On doit leur défendre de lire longtemps de suite, ne fût-ce qu’à cause de la foiblesse de leur vue ; on doit leur défendre toute lecture qui demanderait de l’application ; on doit leur interdire sévérement toutes celles qui pourroient rappeller à leur souvenir des idées, à leur imagination des objets, dont il seroit à souhaiter qu’ils perdissent la mémoire ; mais il en est qui, sans fixer beaucoup l’attention, & sans pouvoir rappeller des images dangereuses, les distraisent agréablement, & préviennent les dangers terribles d’un ennui désœuvré." (Les Passions)
Cet ouvrage fut un véritable best seller de la vulgarisation médicale au cours du XVIIIe siècle et même encore au début du XIXe siècle. La première édition date de 1760 (à Paris de l'imprimerie d'Antoine Chapuis). Il y eut au total plus de soixante éditions.
"On serait tenté de réduire les mœurs sexuelles du dix-huitième siècle aux jeux libertins du plaisir et du désir. Or, excès masturbatoires, pollutions nocturnes récurrentes, maladies vénériennes, impuissance, angoisses sexuelles émaillent le vécu des gens ordinaires du siècle des Lumières. Certains n'hésitent pas alors à demander l'avis d'un médecin. [...]" (in L'usage du sexe. Lettres du Dr Tissot, auteur de L'Onanisme (1760), BHMS éditions, 2015).
Samuel Auguste André David Tissot est né le 20 mars 1728 dans le village vaudois de Grancy et est mort le 13 juin 1797 à Lausanne ; il obtient son diplôme de médecin à la faculté de médecine de l'université de Montpellier (médecin dès le 18 avril 1748 à l'âge de 22 ans). Il part en Suisse et s'installe à Lausanne. Tissot, tout comme la plupart de ses confrères de l'époque, donnent à voir du sexe sans sexualité, du sexe ordonné avant tout autour du problème de l'excès de perte et de rétention de semence. Cet ouvrage et son Avis au peuple sur sa santé (1761) seront ceux de sa célébrité durable. « Prônant une médecine douce, essentiellement pratique, fondée sur un régime de vie en accord avec la nature, et sur des remèdes à base de plantes, il récuse à la fois la médecine populaire et la médecine savante, qu’il juge trop dure et interventionniste. Mêlant archaïsme et modernité, il révèle la hantise des miasmes, souligne l’importance des facteurs psychologiques dans l’évolution des maladies, et introduit les statistiques fondées sur le calcul mathématique pour étudier la mortalité. » (in D. Masseau, Notice de lecture in « Dix-huitième », 1996, p. 577.). Au début du mois de mai 1797, Tissot est atteint d'une tuberculose pulmonaire. Peu après, sa femme est également atteinte et meurt trois semaines plus tard. Il meurt à Lausanne le 13 juin de la même année.
« L'excès dans les plaisirs de l'amour ne produit pas seulement des maladies de langueur ; il jette quelquefois dans des maladies aiguës et toujours il dérange celles qui dépendent d'une autre cause ; il produit très aisément la malignité, qui n'est, selon moi, que le défaut de forces dans la nature. » [...] « (…) Un de mes condisciples était venu à cet état horrible, qu'il n'était pas le maître de s'abstenir de ces abominations, même pendant le temps des leçons : il n'attendit pas longtemps son châtiment et il périt misérablement de consomption au bout de deux ans. » (extraits)
Très bon exemplaire broché, tel que paru, imprimé sur beau papier.
Prix : 500 euros