La Vie de César Borgia, appellé du depuis le Duc de Valentinois, décrite par Thomas Thomasi
Traduit de l'italien, imprimée à Monte Chiaro, chez Jean Baptiste Vero, 1671 [Amsterdam, Daniel Elzévier ? Jean Blaeu ?]
2 parties reliées en un volume in-12 (136 x 80 mm | hauteur des marges : 132 mm) de 495 pages y compris le titre et l'avis au lecteur.
Reliure plein maroquin janséniste vert sombre, titre doré au dos, millésime doré en queue du dos, filet doré sur les coupes, roulette dorée en encadrement intérieur des plats, doublures et gardes de papier peigne, tranches dorées (reliure signée THOUVENIN, tampon au verso du feuillet de garde). Quelques légers frottements et marques à la reliure qui reste en excellent état et décorative. Intérieur frais avec de bonnes marges.
Petit volume peu commun que les bibliographes ont donné à l'officine d'Amsterdam de Daniel Ezévier. Eugène Paillet, célèbre bibliophile de la fin du XIXe siècle en possédait un exemplaire relié par Capé (cat Morgand, 1878, ex. adjugé 120 francs à la vente du Baron de Villestreux).
"MM. Brunet et Bérard disent ces deux éditions des elzévirs véritables; nous disons que ce sont des Blaeu de la plus grande certitude." (Gustave Brunet, Recherches sur diverses éditions elzéviriennes, etc. 1866, pp. 81-82)
"L'homme machiavélique, l'uomo politicante, l'homme du règne, l'homme de la force, ou, pour tout dire, l'homme de la force et de la ruse, l'homme de la ruse pour la force, le voici : c'est César Borgia. En lui, Machiavel trouve le Prince. L'honnête Tommaso Tommasi n'y trouvera qu'un « monstre. [...] Au moment de commencer sa Vie du duc de Valentinois, gêné par plusieurs traits de son sujet, il éprouve en quelque sorte le besoin de s'excuser auprès du lecteur ; mais, gêné aussi par la révérence due aux saintes clefs, il le fait d'abord dans des termes dont la solennité précieuse ne laisse pas que d'être assez comique :
La nature, écrit-il, a accoustumé de diviser, dans la production des monstres qui naissent dans l'Afrique, la difformité qu'entraisnent après eux les illicites accouplemens des animaux, pour rendre détestables à jamais au monde les excès d'une sensualité déreiglée, que la prudence humaine a tâché de pallier sous le nom d'enfantement d'amour, en ce que, faisant voir dans les effets qui proviennent de ces estranges accouplemens une ressemblance de deux causes dissemblables, qui ont concouru à leur donner le jour, elle des couvre deux bestes sauvages en une, et fait voir sous cette forme difforme la brutalité de cette sensuelle fureur, qui renverse les loix de la génération. Celuy de qui j'entreprends de descrire la vie fut (selon qu'on le pourra voir dans la suite de cette histoire) une beste cruelle, qu'on peut appeller, sans craindre de se tromper beaucoup, africaine, qui n'a pas esté engendrée d'un pur sang humain, mais qui est sortie, ainsi que le remarque très bien un historien, d'une semence exécrable et pleine de venin: ainsi ce n'est pas une merveille s'il paroist comme un monstre de cruauté, et s'il vient par des voyes injustes dans le monde, puisqu'il est la production d'une illégitime conjonction; de sorte que, s'il représente en luy la véritable image de ses parens, il ne sçauroit estre qu'un monstre incomparablement plus difforme que tous ceux qu'on sçauroit s'imaginer. [...] » (Charles Benoist, in Revue des Deux Mondes, pp. 56-86, année 1906).
César Borgia (en valencien et en Catalan, César de Borja), dit « le Valentinois » (Il Valentino), est un prince italien de la Renaissance, né le 13 septembre 1475 à Rome et mort le 12 mars 1507 à Viana, en Navarre. Il succède à son frère Giovanni Borgia (Juan Borgia) en tant que duc de Gandie.
Il est pair de France, chevalier de l'ordre de Saint-Michel, prince de Romagne, d'Andria et de Venafro, duc de Gandie et de Valentinois, comte de Diois, seigneur d'Issoudun, de Piombino, Camerino et Urbino, gonfalonier et capitaine général de l'Église, condottière et cardinal.
Il doit sa notoriété en grande partie à Machiavel qui le cite fréquemment dans le Prince. Cependant, seul l'appui de la papauté et de la royauté lui permit d'avoir une carrière aussi fulgurante.
Cette traduction française est due à Casimir Freschot publiée initialement en italien sous le titre "La vita del duca Valentino". Cette impression en français est parfois aussi donnée à Jean Blaeu qui publie également la version italienne. L'imprimerie de Jean Blaeu fut ravagée par un incendie le 22 février 1672, seulement quelques mois après l'impression de ce volume. L'imprimeur ne survécut que quelques mois à cette tragédie.
"la première [partie] prend depuis la naissance du Duc de Valentinois, & poursuit le cours de ses aventures jusques à sa promotion à la pourpre, & finit enfin par les nopces quil célébra dans la cour de France. La seconde parle de son retour en Italie avec le Roy Louys XII traite en suite de ses Grandeurs séculières, & discours, après avoir parcouru tous les merveilleux succez de ses propres malheurs & de sa fin" (extrait de l'Avis au lecteur).
Cette biographie de César Borgia est considérée comme une bonne source historique. Victor Hugo s'en est largement inspiré pour construire son Lucrèce Borgia (1833). Elle est parfois aussi attribuée au polygraphe et historien protestant Gregorio Leti.
La reliure signée Thouvenin date des années 1860-1880. Il s'agit d'une production de Félix-Paul Thouvenin (1821-1899), fils de Thouvenin Jeune, établi en 1858, 35 rue Godot-de-Mauroy où il exerça jusqu'en 1883.
Provenance : de la biblothèque Yves Refoulé avec son ex libris gravé. Yves Refoulé était militaire, notamment au 18ème régiment de Dragons. Il épouse Marguerite Frachon en 1903. Sa vie n'est connue qu'au travers des exemplaires de sa bibliothèque et son goût pour les ouvrages précieux dont le militaria et la bibliophilie classique de la fin du XIXe siècle et du début du XXe siècle.
Très bon exemplaire de ce joli volume.
Prix : 950 euros