vendredi 17 janvier 2020

Guillaume-Thomas Raynal. Histoire philosophique et politique des établissements et du commerce des européens dans les deux Indes (1775). Première édition au format in-quarto reliée à l'époque aux armes. Bel exemplaire.


[Raynal (Guillaume-Thomas). Diderot (Denis). Holbach (Baron d').].

Histoire philosophique et politique des établissements et du commerce des européens dans les deux Indes.

A Genève, chez les libraires associés, 1775

3 volume in-4 (26 x 20 cm) de (4)-IV-III-VIII-719, (4)-VIII-662 et (4)-VIII-658 pages. Portrait de l'auteur en frontispice du premier volume (dessiné par Cochin et gravé par L. Le Grand). Au tome I : 1 gravure hors-texte (livre I) + 1 grande carte repliée + 1 bandeau à l'eau-forte par Marillier + 1 gravure hors-texte (livre IV). Au tome II : 1 gravure hors-texte (livre VII) + 2 cartes repliées + 1 bandeau à l'eau-forte par Marillier + 1 gravure hors-texte (livre X). Au tome III : 1 gravure hors-texte (livre XIV) + 1 carte repliée + 1 bandeau à l'eau-forte par Marillier + 1 gravure hors-texte (livre XV) + 1 gravure hors-texte (livre XVIII). Soit 1 portrait, 7 gravures hors-texte (avant la lettre), 3 bandeaux et 4 cartes. Collationné complet.


Reliure de l'époque plein veau caramel, dos à nerfs orné aux petits fers, pièce de titre de maroquin rouge, pièce de tomaison de maroquin olive. Reliures très décoratives et solides. Usures de surface sur les plats du premier et deuxième volume (épidermures stoppées), petits manques de cuir et petite galerie sans gravité, petites piqûres de vers en queue du dos du premier volume. Malgré ces quelques défauts l'ensemble reste très décoratif et parfaitement solide. Intérieur très frais. A noter une mouillure en marge intérieure des trois premiers feuillets du premier volume et les derniers feuillets du même volume avec mouillure marginale saine (à quelques feuillets seulement).

Exemplaire relié à l'époque aux armes (en queue) d'un membre de la famille de Damas (?) ou d'Aubusson (?).

Première édition au format in-quarto.

Cette édition est bien complète en 3 volumes in-quarto (il n'y a pas d'atlas pour cette édition).

Elle reprend le corpus de l'édition en 7 volumes in-8, avec les passages supprimés réintégrés ici au bas des pages sous forme de variantes.


La première édition de ce magistral ouvrage a paru pour la première fois en 1770. "Véritable encyclopédie de l’anticolonialisme au XVIIIe siècle" ce texte entre dans la catégorie des "Voyages philosophiques" et représente un prétexte à des réflexions sur la "loi naturelle" et dénonce tout à la fois despotisme, cléricalisme, esclavage et colonialisme. L'ouvrage est toujours décrit par les commentateurs comme une « machine de guerre » contre le pouvoir en place. Pour la rédaction de cette encyclopédie Raynal eut recours à la collaboration de nombreux informateurs et collaborateurs écrivains tels que le Baron d'Holbach ou Diderot, à qui on attribue une part importante des textes.


Interdite en 1772, l’Histoire des deux Indes sera à nouveau publiée par l’abbé Raynal dans une nouvelle édition en 1774 qui est immédiatement mise à l’Index par le clergé. C’est en 1780 qu’il publie sa troisième édition de l'Histoire des deux Indes, encore plus virulente que les deux précédentes et qu’il avoue implicitement comme étant de lui en y faisant graver son portrait en frontispice. Condamné par le Parlement de Paris, l’ouvrage est brûlé par le bourreau en place publique, ce qui lui assure un succès considérable. L’Histoire des deux Indes a également été l’occasion de la Lettre apologétique de l’abbé Raynal à Monsieur Grimm (1781) de Diderot (qui aurait écrit au moins un tiers de l'ouvrage, selon Grimm). Dans cette lettre Diderot écrit : « Raynal est un historien comme il n'y en a point encore eu, et tant mieux pour lui, et tant pis pour l'histoire. Si l'histoire avait, dès les premiers temps, saisi et traîné par les cheveux les tyrans civils et les tyrans religieux, je ne crois pas qu'il en fussent devenus meilleurs; mais ils en auraient été plus détestés, et leurs malheureux sujets en seraient peut-être devenus moins patients... Le livre que j'aime et que les rois et leurs courtisans détestent, c'est le livre qui fait naître des Brutus... »


Dans notre exemplaire une note manuscrite de l'époque révolutionnaire indique : "Le Parlement de Paris proscrivit, le 25 mai 1781, l'Histoire philosophique de l'abbé Raynal, et ordonna que cet ouvrage fût brûlé. Il décréta même l'auteur de prise de corps. L'abbé Raynal se vit donc forcé de s'enfuir précipitamment de France. Le 15 août 1790, l'Assemblée nationale, sur la rédaction proposée par les députés Voidel et Maloüet, annula, comme contraire aux droits naturels et imprescriptibles de l'homme, le décret lancé par le Parlement de Paris contre l'abbé Raynal et son Histoire philosophique (v. Oeuvres d'André Chénier, 2e vol., p. 119)." (note manuscrite ancienne sur le faux-titre du premier volume).


"It became a key text of the American Revolution, and Raynal became a correspondent of Franklin, Jefferson, and Adams."

"Un des ouvrages clefs de la crise de l'Ancien Régime" (Michel Delon, in En Français dans le texte)






"Celui qui abdique lâchement sa liberté, se voue au remords et à la plus grande misère qu’un être pensant et sensible puisse éprouver. S’il n’y a, sous le ciel, aucune puissance qui puisse changer mon organisation et m’abrutir, il n’y en a aucune qui puisse disposer de ma liberté. [...] L'esclavage est l'état d'un homme qui, par la force ou des conventions, a perdu la propriété de sa personne, et dont un maître peut disposer comme de la chose. [...] La liberté est la propriété de soi; on distingue trois sortes de libertés: la liberté naturelle, la liberté civile, la liberté politique; c'est-à-dire la liberté de l'homme, celle du citoyen et celle d'un peuple. [...] L'homme est aux prises avec la nature; sans cesse il la modifie, et sans cesse il est modifié. [...]." (extraits).

Provenance : A. Leclerc, 1885 (étiquette). Armes dorées en queue des dos (mariage - non identifiées  - non reconnu par O.H.R. qui les cite pourtant sous la planche n°888, figure n°3). Armoiries peut-être d'une ancienne famille de Bourgogne ? (provenance bourguignonne pour les volumes concernés). Par ailleurs O.H.R. les mentionne sur une Histoire de Bourgogne), peut-être les armes d'une branche de la famille de Damas (à la croix ancrée) ou d'Aubusson. Les présents volumes de Raynal ont été acquis également en Bourgogne ce qui laisserait supposer l'hypothèse "de Damas" plus pertinente.

Références : A. Feugère, Bibliographie critique de l'abbé Raynal, 40 ; En français dans le texte, 166 ;


Bel exemplaire relié aux armes à l'époque de cet ouvrage très important du Siècle des Lumières, dans son format le plus majestueux.

VENDU