vendredi 14 septembre 2018

Eliphas Lévi. L'Assomption de la Femme ou le Livre de l'Amour (1841). Edition originale très rare. Exemplaire non rogné en condition d'époque.


LÉVI (Éliphas) - [Abbé Constant]

L'Assomption de la Femme ou Le Livre de l'Amour. Par l'abbé Constant.

Paris, Aug. Le Gallois, chez Pilout, 1841 [Imprimerie de Pommeret et Guénot]

1 volume in-12 (16,8 x 11 cm) de XXVIII-252 [i.e. 152] pages.

Cartonnage bradel de l'époque demi-percaline rouge, plats de papier marbré, non rogné (relié sur brochure). Papier vélin fin dépourvu de rousseurs. Reliure en très bon état. Légers frottements.

Édition originale.



L'abbé Alphonse Constant, plus connu sous le pseudonyme d'Eliphas Lévi, est né en 1816 et mort en 1875 à Paris. Il fut professeur d'Hébreu au Petit Séminaire St Sulpice et s'est occupé d'art (de peinture particulièrement) puis de politique : de ce dernier chef il subit même quelques mois de prison. En 1848, il quitte définitivement la soutane et épouse Mlle Noémie Cadiot, qui est connue comme romancière, sculpteur et journaliste sous le nom de Claude Vignon. Cette union, peu heureuse, fut annulée au bout de quelques années, et en 1875 après la mort de l'abbé Constant, sa veuve épousa Maurice Rouvier; député de Marseille, et plus tard Ministre et président du Conseil. Dans les dernières années de sa vie, l'abbé Constant dut demander ses moyens de subsistance à un petit commerce de fruiterie. Son pseudonyme, Eliphas Lévi Zaed est la traduction en hébreu francisé de ses trois noms : Alphonse, Louis, Constant, mot à mot. (Caillet). Eliphas Lévi est considéré comme le rénovateur de l'occultisme en France au XIXe siècle.



Cet ouvrage, l'un des premiers de l'auteur, devait être intitulé l’Évangile de l'amour ; mais ce titre ayant effrayé l'imprimeur (un procès fait à l’Évangile du peuple du même auteur et publié seulement quelques mois plus tôt avait valu à son auteur 8 mois de prison et 300 francs d'amende) il lui avait substitué celui de L'Assomption de la femme. La Confession qui précède le texte et qui occupe les XXVIII premières pages a fait l'objet d'auto-censure par l'auteur. "Évangile veut dire bonne nouvelle apportée à la femme par un ange" écrit Epliphas Lévi en tête du texte. "La nouvelle que l'ange apportait à la femme était celle de son affranchissement par l'intelligence et l'amour." Le reste du volume est une revue du Cantique des Cantiques accompagné des commentaires mystiques de l'auteur. "Qu'elle me baise [la femme] du baiser de sa bouche ! car tes mamelles sont plus délicieuses que le vin. [...] Ainsi les jeune filles l'ont tendrement aimée [comme les jeunes colombes se caressent entre elles, ainsi vous vous aimez dans votre adolescence, jeunes filles pures et naïves ! Et dans les tendres embrassements d'une délicate amitié vous rêvez d'autres caresses plus tendres encore, des affections plus intimes, un épanchement plus délicieux. [...] O femme ! tous les bons coeurs doivent t'aimer ! [La société où nous vivons n'est pas la société des justes, car elle n'aime pas la femme : la femme est élevée pour la servitude, et on l'exerce de bonne heure à feindre et à se cacher. On la vend au mariage sans consulter son coeur ; et un homme souvent brutal, presque toujours détesté, la rient à la chaîne, ne l'aime pas et lui défend d'aimer personne. [...] Car Ève et Marie ne sont qu'un même symbole, et c'est celui que l'antiquité nous présentait sous la figure de Pandore. Pandore ouvre par curiosité la boîte fatale de la science où sont renfermés tous les maux : c'est Ève qui cueille et goûte le fruit défendu. Mais, au fond de la boîte, Pandore garde et apporte aux humains l'Espérance : c'est Marie qui descend du ciel, enceinte du Verbe incarné. Ainsi tout a commencé par la femme, et par elle tout doit finir. [...]"



Eliphas Lévi s'explique sur l'Assomption de la femme dans une lettre du 30 mai 1862 adressée à l'un de ses élèves : "Marie est la personnification humaine de Chocmah, la sagesse divine ou la Sainte Schechinah, la lumière manifestée par reflet. Elle est le côté féminin du Verbe fait chair, et participe par assomption à toutes les gloires de Jésus-Christ. Le femme élève l'homme : mais l'homme élève la femme. Tel est le mystère de l'assomption de Marie entraînée dans l'ascension de Jésus-Christ par le lien d'amour qui ne saurait être rompu entre le fils et la mère de l'humanité qui croit en Dieu. A ce titre elle est élevée au dessus des anges non par ses propres forces, mais par le mérite de son fils. Exaltation toute divine et à laquelle la chair ne participe en rien. L’Évangile dit peu de choses sur Marie, et son Assomption est une tradition en dehors des Écritures. Cette Assomption peut être considérée comme dogmatique et comme légendaire. [...] Les légendes sont des fleurs qui se fanent au souffle glacé de la critique. L'Assomption de la femme est un des grands mystères de l'humanité. C'est la sanctification de l'amour, et toute la lumière de ce mystère divin est caché dans le Cantique des cantiques, cet admirable poème où Salomon s'écrie : Quoe est illa quoe procedit sicut aurora consurgens, innixa super sponsum ? Quelle est cette beauté qui monte dans le ciel appuyée sur son bien-aimé comme l'aurore qui annonce le lever du soleil ? Marie est une double aurore : celle du lever et celle du déclin. Son amour seul est vivant dans le catholocisme moderne." (extrait de La Philosophie Kabalistique et Occulte d'Eliphas Lévi, Tome 1, Lettres aux étudiants, Daath Gnostic Publishing, 2018 (4e édition).



Très bon exemplaire de cet ouvrage très rare.

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