Nicolas-Edme Rétif de la Bretonne [Restif de la Bretone]
La Malédiction Paternelle : Lettres sincères et véritables de N. ******, à ses parents, ses amis, et ses maîtresses, avec les réponses : Recueillies et publiées par Thimothée Joly, son exécuteur testamentaire.Imprimé à Leipsick, Par Buschel, marchand-libraire et se trouve à Paris chés la Dame Veuve Duchesne, 1780
3 parties reliées en 3 volumes in-12 (16,7 x 9,8 cm) de 830 pages (pagination continue) et 5 feuillets non chiffrés (catalogue et présentation d'ouvrages de Rétif).
Reliure strictement de l'époque demi-veau brun, plats de papier à la colle. Dos légèrement frottés, dorures un peu effacées par endroit, coins émoussés/usés. Rousseurs non obsédantes. Un petit trou dans un feuillet du premier volume (rouille). Papier de diverses qualités selon les cahiers. Collationné complet. Bien complet des 3 frontispices et des 5 feuillets non chiffrés à la fin du troisième volume.
Edition originale et unique édition ancienne.
"Lorsque paraît La Malédiction paternelle, en août 1779, sous le millésime de 1780, Rétif est déjà un auteur confirmé. Il publie régulièrement depuis 1767 (La Famille vertueuse est sa première œuvre) et en une douzaine d’années il a produit 44 volumes in-12 sous 19 titres. Beaucoup ne se distinguent guère des ouvrages du temps, ni par leur facture (recours à la forme épistolaire), ni par leur idéologie morale. Ce conformisme littéraire n’a valu à l’écrivain qu’un accueil médiocre, mais trois œuvres lui ont tout de même permis d’acquérir quelque notoriété, parce qu’elles sortent, chacune à leur manière, des sentiers battus de la littérature. Il y eut d’abord Le Pornographe (1769), « Projet de règlement pour les prostituées », traité inséré dans le cadre d’un roman épistolaire, puis, sous le même millésime, Le Pied de Fanchette, roman enjoué et parodique, au titre discrètement érotique, objet de plusieurs éditions et contrefaçons jusqu’à la fin du XVIII e siècle. Mais le succès le plus décisif est venu en 1775 avec Le Paysan perverti : « Cet ouvrage, qui m’a donné une existence dans le monde, fut la source de ma réputation et me procura une considération dont tous les bons esprits me donnent encore des marques », écrit Rétif dans Mes Ouvrages ; de fait, il restera durablement, en dépit d’autres succès (notamment avec les volumes de nouvelles des Contemporaines), « l’auteur du Paysan perverti ». [...] Rétif va alors prendre conscience qu’il doit exploiter résolument la veine autobiographique, et plus précisément son parcours singulier de paysan bourguignon devenu ouvrier parisien dans l’imprimerie. Ce n’est pas qu’il n’ait précédemment nourri ses histoires de souvenirs personnels, mais il convient désormais de mettre mieux en valeur ses origines, son enfance, son adolescence. Il s’y essaye avec L’École des pères (1776), mais l’ambition didactique de l’ouvrage dilue quelque peu les traits du tableau rural. Il s’éloigne ensuite de cette inspiration avec Le Quadragénaire (1777) et Le Nouvel Abeilard (1778), deux romans qui ne se font guère remarquer. Or s’affirme de plus en plus le succès du Paysan perverti. Rétif est alors convaincu que la reconnaissance de son génie littéraire passe par la mise en œuvre du thème campagnard, domaine où il a, sur tous les autres littérateurs, l’avantage d’une expérience authentique. De là, en 1779, la publication de La Vie de mon père, avec en page de titre cette indication significative : « par l’auteur du Paysan perverti ». À La Vie de mon père succède immédiatement La Malédiction paternelle. [...] La Malédiction paternelle inaugure incontestablement une nouvelle époque dans la carrière littéraire de Rétif, celle où il s’engage dans l’autobiographie proprement dite. [...] Dans La Malédiction paternelle, la figure du père reproduit les traits de Pierre et non ceux d’Edme : cette autorité impérieuse, cette volonté de choisir l’épouse de son fils. [...] Le manuscrit de La Malédiction paternelle n’existe plus, sans doute depuis l’impression de l’ouvrage, selon les habitudes du temps. Il n’y a pas eu, du vivant de l’auteur, d’autres éditions que celle de 1779. [...] La seule façon d’échapper à la conscience coupable, de surmonter le sentiment de subir une malédiction, est d’écrire, de publier, d’accomplir pleinement cette vocation intellectuelle qui l’a détourné de sa destinée de paysan. À cet égard, La Malédiction paternelle est une œuvre cruciale : elle ressaisit une matière romanesque déjà mise en œuvre dans des ouvrages précédents (Le Quadragénaire, Les Nouveaux Mémoires d’un homme de qualité) et féconde les livres à venir. Rétif a souligné lui-même cette fonction matricielle : la Malédiction « est la préface naturelle des Contemporaines ». [...]" (extraits de l'Introduction à l'édition critique donnée par Pierre Testud, La Malédiction Paternelle, Ed. Champion, 2006).
Provenance : Sébastien Mioche (exlibris).
Très bon exemplaire, conservé dans sa reliure de l'époque, de cet ouvrage rare de Rétif de la Bretonne.
Prix : 3.000 euros
Références : P. Lacroix, pp. 159-162 "Les plus jolis dessins que Binet ait jamais faits se trouvent dans ce roman ; ils égalent ceux de Marillier et peut-être ceux de Moreau." ; Rives-Childs pp. 253-256 "La Malédiction paternelle, qui fut singulièrement négligée par les biographes de Restif, est un des plus importants de ses ouvrages, à part Monsieur Nicolas et les Nuits de Paris, pour l'histoire de sa vie."
Très bon exemplaire, conservé dans sa reliure de l'époque, de cet ouvrage rare de Rétif de la Bretonne.
Prix : 3.000 euros