Page de titre dite "à la croix de Malte"
(1665)
BUSSY-RABUTIN, Roger de Rabutin, comte de Bussy, dit
HISTOIRE AMOUREUSE DES GAULES.
[Croix de Malte], A LIÈGE, s.d. (1665)
1 volume in-12 (129 x 78 mm - Hauteur des pages : 126 mm - Marge blanche latérale : 15,5 mm.), de 1 feuillet de titre, 190 et 69 pages, 3 pages de clef.
Reliure plein maroquin janséniste vert sombre, dos à nerfs soulignés de caissons à froid, titre et millésime dorés, double-filet doré sur les coupes, roulette dorée en encadrement intérieur des plats, tranches dorées sur marbrure, doublures et gardes de papier peigne (reliure signée DURU et datée 1851). Exemplaire à l'état proche du neuf, tant au niveau de la reliure que de l'intérieur. Exemplaire soigneusement lavé et réencollé par Duru. Fine reliure du milieu du XIXe siècle.
ÉDITION DITE "A LA CROIX DE MALTE".
ÉDITION PARFOIS DONNÉE COMME ÉTANT LA PREMIÈRE PAR CERTAINS BIBLIOGRAPHES, RÉFUTÉE PAR D'AUTRES.
Cette édition divisée en deux parties paginées séparément, avec une croix de Malte sur le titre et la clé en trois pages reliée à la fin, contient dans les 190 premières pages une histoire amoureuse de la cour de Louis XIV, et s'achève par ces mots "Fin de l'Histoire d'Angelie et de Ginotic (Monsieur et Madame de Châtillon). Vient ensuite la deuxième partie du volume en 69 pages, intitulée "Suite de l'Histoire d'Ardelise" (Madame d'Olonne), puis "Portrait de Madame de Cheneville" (la marquise de Sévigné, Marie de Rabutin Chantal, sa cousine), puis enfin "Histoire de Bussy et de Belise" (Madame de Monglas).
Provenance : Il y a toutes les apparences pour que cet exemplaire soit celui catalogué sous le n°731 de la vente Duplessis de 1856 (ancien recteur de l'Académie de Douai), la description est identique (Paris, L. Potier, 1856, n°731). Le volume ne contient aucune marque d'appartenance.
Localisation de quelques anciens exemplaires : Catalogue de la librairie Morgand et Fatout : n°2061 - maroquin bleu de Trautz-Bauzonnet, grand de marges : 325 francs or (mai 1876) "Edition rare, une des plus anciennes" ; n°5.465 - maroquin de Thibaron "Edition dite à la croix de Malte" : 100 francs or (octobre 1879) ; n°7378 - maroquin de Trautz-Bauzonnet (500 francs or - juin 1881) ; n°11.829 - riche reliure de Capé : 500 francs or (février 1887).
Historique des éditions anciennes : Tchémerzine, qui décrit plus d'une dizaine d'éditions anciennes de l'Histoire amoureuse des Gaules, sur près de 10 pages, donne une édition également à la croix de Malte en 259 pages comme étant l'originale. Il y a n'y a aucune preuve avancée à cela. Jusqu'à la fin du XIXe siècle et encore après, c'est notre édition en 190 et 69 pages qui était donnée comme la plus ancienne de toutes (voir les catalogues Morgand et Fontaine). D'après Tchémerzine toujours, il existe donc 3 éditions dites à la "croix de Malte", toutes sans date et publiées sous l'adresse de "A Liège". Elles se différencient non seulement par la pagination (259 pages, 190-69 pages et 190-68 pages) mais aussi par de légères variantes dans la composition de la page de titre (notamment les U). Notre édition qui correspond à 153a contient pourtant la page de titre du 153b. La plupart des catalogues de vente ne différencient pas aujourd'hui ces trois éditions, étant dénommées indifféremment "éditions à la croix de Malte" et passant pour être les plus anciennes de ce texte. En ce qui nous concerne, nous retenons cette édition (tirage ?) en 190 pages et 69 pages comme la première émission sur le critère suivant : il nous apparaît peu probable que l'édition à pagination continue ait été la première. Il nous paraît plus probable que la première édition se trouve parmi les deux dont la pagination est divisée en deux parties. Processus logique lorsqu'on contrefait ou reproduit une édition, on élimine autant que possible les paginations fantaisistes qui n'ont pas lieu d'être par la suite. D'ailleurs, l'argument se vérifie si l'on considère que les éditions parues les années suivantes (1666, 1667, 1668) sont paginées d'une seule partie en 244, 246, 237 et 258 pages. Certains libraires continuent pourtant à donner l'édition de Liège à la croix de Malte (1665) en 259 pages comme l'originale, sans autres preuves que les assertions de Tchémerzine. Sans doute les avis seront difficiles à trancher en la matière encore pour longtemps.
En 1653, Bussy est reçu à l'Académie Française ; c'est durant cette période que la première partie de son Histoire amoureuse des Gaules, dont il avait, sous le sceau du secret, confié le manuscrit à Mme de la Baume, commença à faire du bruit. Dans cet ouvrage, la conduite scandaleuse de quelques femmes de la cour est révélée sans ménagement et sans pudeur, les plaintes vinrent de tous côtés ; ces histoires étaient pourtant bien connues à la cour (Bussy dira de ce roman, qu'il n'a rien inventé) ; il fût fortement soupçonné d'avoir fait entrer le roi dans son roman. Pour cela il fut embastillé, et pour s'en sortir, il se démit de ses charges ; se soumettant de plus à écrire des excuses auprès des personnes diffamées dans son livre. Exilé dans ses terres de Bourgogne, il ne supporta pas cette disgrâce avec le courage dont il avait tant de fois fait preuve à la guerre. Il ne cessa de solliciter la grâce du Roi pour son retour à la cour, dans un grand nombre de lettres du style le plus servile, et remplies des sentiments d'une adoration basse. Son exil dura 17 ans. Bussy put revenir en 1682 à la cour mais le Roi ne l'honora même pas d'un regard, il retourna alors dans sa terre bourguignonne, où il acheva sa carrière dans la culture des lettres et dans les exercices de la dévotion. Il décédera à Autun d'une apoplexie le 9 avril 1693, il était âgé de 75 ans. Bussy eut une jeunesse assez dissipée, comme toute la jeunesse dorée de son temps, ni plus ni moins. Il faisait grand cas de sa personne, et cela lui attira des ennemi(e)s durant toute sa vie. Sa cousine, la marquise de Sévigné (née Rabutin-Chantal), ne fut pas épargnée par les sarcasmes de Bussy. De celle-ci il donnera dans ce texte félon un portrait physique au vitriol et un portrait moral non moins bassement répugnant : il écrira d'elle qu'elle ne fut amie que jusqu'à la bourse (ce qui était somme toute vrai). Cousin cousine finirent par se réconcilier non sans peine. Bien qu'il existât une chambre de la marquise de Sévigné au Château de Bussy-Rabutin en Bourgogne, il n'est pas prouvé qu'elle n'y vint jamais (alors que l'on sait qu'elle se rendit chez son ami de Guitaut, celui-là même en faveur de qui Bussy se démit de sa charge de capitaine-lieutenant des armées du roi). Il n'existe pas de manuscrit autographe de l'Histoire amoureuse des Gaules, et pour cause !
SPLENDIDE EXEMPLAIRE PARFAITEMENT ÉTABLI PAR HIPPOLYTE DURU DE CETTE EDITION RARE.
VENDU