lundi 9 septembre 2024

Nicolas-Edme Rétif de la Bretonne [Restif de la Bretone]. La Femme dans les trois états, de Fille, d'Epouse, et de Mère. Histoire morale, comique et véritable. A Londres, et à Paris, chés De-Hansy, libr. rue Saint-Jaques, 1773. 3 parties reliées en 1 volume in-12. Reliure strictement de l'époque plein veau marbré. Edition originale imprimée à 1.000 exemplaires. Bel exemplaire de ce roman moral peu commun de Rétif de la Bretonne.


Nicolas-Edme Rétif de la Bretonne [Restif de la Bretone]

La Femme dans les trois états, de Fille, d'Epouse, et de Mère. Histoire morale, comique et véritable.

A Londres, et à Paris, chés De-Hansy, libr. rue Saint-Jaques, 1773

3 parties reliées en 1 volume in-12 (17,5 x 10 cm) de (4)-232, 202 et 202 pages. Collationné complet. En réalité pagination de la deuxième partie est fautive et passe de la page 151 à 194, sans manque de texte. Idem pour la troisième partie où la pagination passe de la page 181 à 198, sans manque de texte.

Reliure strictement de l'époque plein veau marbré, dos lisse orné, tranches marbrées bleues. Quelques très discrètes anciennes restaurations à la reliure. Intérieur assez frais avec quelques brunissures du papier. Quelques feuillets déréglés.

Edition originale imprimée à 1.000 exemplaires.




Pierre Testud écrit à propos de cet ouvrage peu commun de Rétif de la Bretonne : « Ce petit ouvrage […] fut donné à l’impression le 4 juin [1772], mais il ne parut qu’au mois de février 1773 » (Monsieur Nicolas, II, p. 246) ; on lit dans la Revue de La Vie de mon père (1788) : « a paru à la fin 1772 » ; cette indication paraît une erreur. Selon Mes Ouvrages, La Femme dans les trois états, procède de Lucile : « La Lucile, imprimée par Valade, se fût mieux vendue en deux parties : je la divisai, sous le titre de La Fille enlevée. Mais je m’aperçus bientôt que c’était un ouvrage à refaire en entier, et je refis Lucile, fille, épouse et mère. J’étais dans cette intention quand je tombai malade, en 1771, au Collège de Presle. Ayant la tête assez libre, je me mis à composer la seconde partie de La Femme dans les trois états de fille, d’épouse et de mère ; elle est pleine de gaieté ; elle me divertissait, en la faisant. Je conçus, après l’avoir achevée, que c’était du temps perdu que de l’imprimer comme suite de Lucile ; je fis une première partie que j’intitulai La Fille ; la seconde fut titrée La Femme, ce qui me donna l’idée d’en composer une troisième, qui fut La Mère. Mais la seconde resta supérieure aux deux autres. Cependant la première n’est pas sans mérite, mais la troisième est décousue et presque sans intérêt ; je n’échappe à l’ennui que par des épisodes fréquents » (Mes Ouvrages, p. 908-909). Rétif signale que dans la 1re Partie, « il y a un chapitre, Régime, qui a beaucoup contribué au succès de l’ouvrage » (Quadragénaire, II in fine) ; « La seconde partie, La Femme, est la mieux faite, à l’exception des trois ou quatre derniers chapitres ; elle est pleine de gaieté par le caractère singulier de la belle-sœur de l’héroïne, qui anime tout » (ibidem). L’ « Avertissement » de la 3e avoue que dans cette partie, « il se trouve presque autant d’histoires que de chapitres » (p. 5). »









"Restif avoue effrontément, dans Monsieur Nicolas, qu'il n'était pas trop en état de penser aux femmes, lorsqu'il composa la Femme dans les trois états. Si sa santé du corps avait été atteinte, sa tête restait libre, et la pauvre victime de l'amour eut le projet de donner, dans cet ouvrage, une suite à son roman de Lucile. C'est le seul de ses romans pour lequel il n'eut pas de muse en titre. Sa condition de malade lui interdisait ce luxe inutile." (Rives-Childs)

Il est assez piquant de signaler les trois épigraphes qui sont sur chacun des titres : La Fille, ordinairement, est bonne, douce, obligeante, jusqu'à vingt ans ... Ce qu'on appelle une Femme honnête ferait un homme bien médiocre. (Pope). L'Homme-enfant doit rester longtemps entre les mains des Femmes, afin d'y prendre cette candeur, cette aménité que la meilleure éducation par les hommes ne donne qu'imparfaitement.






"[...] Et vous, Jeunes-personnes , soyez convaincues, qu’il n'est pour vous qu’un moyen de témoigner votre reconnaissance à vos Parents, & de payer le bien fait de la vie ; c'est de les aimer, de les respecter , & de ne jamais leur contester l'absolu pouvoir qu’ils ont sur vous. Un Fils, en portant notre nom, en l'illustrant, fût-il d’ailleurs injuste & dur à notre égard, ne laisse pas de nous faire goûter une sorte de satisfaction, dont beaucoup de Pères se contentent ; mais vous, aimables Filles, vous n’avez que vos mœurs & vos soins envers nous, qui puissent acquitter ce que vous nous devez. Je vais présenter ici l’exemple d’une Jeune-fille prête à se perdre par la désobéissance, quoiqu’elle n’ait résilié ou foutenue des meilleures raisons. Jeunes-personnes, ne l’imitez pas dans la première cause de ses écarts : l’enchaînement des circonstances qui la font échapper au déshonneur, à la sédustion, paraîtront si rares, que peut-être elles ne se font rencontrées que cette fois ; elles sont vraies sans-doute, mais à-peine vraifemblables, ce ferait une témérité de compter fur des miracles. [...]" (extrait)

Personne ne dit où a été imprimé cet ouvrage.

Cet ouvrage de Rétif ne connaîtra jamais la notoriété et n'aura aucune édition moderne (sauf l'édition anastatique donnée par Honoré Champion en 1988). 

Références : Lacroix X, n°1, pp. 114-115 ; Rives-Childs, X, p. 219

Provenance : petit cachet à l'encre violette (XIXe s.) non identifié (voir photo ci-dessus).

Bel exemplaire de ce roman moral peu commun de Rétif de la Bretonne.

Prix : 2.800 euros

jeudi 5 septembre 2024

Nicolas-Edme Rétif de la Bretonne [Restif de la Bretone]. La Confidence nécessaire. Lettres anglaises. Lettres de Lord Austin de N**, à Lord Humfrey de Dorset son ami. A Cambridge, et se trouve à Londres, chez Nourse & Snelling, 1769. 2 parties reliées en 1 volume in-12. Bel exemplaire en condition d'époque ce roman par lettres rare.


Nicolas-Edme Rétif de la Bretonne [Restif de la Bretone]

La Confidence nécessaire. Lettres anglaises. Lettres de Lord Austin de N**, à Lord Humfrey de Dorset son ami.

A Cambridge, et se trouve à Londres, chez Nourse & Snelling, 1769

2 parties reliées en 1 volume in-12 (16,6 x 10 cm) de XVI-248 et 215 pages. Titres imprimés en noir dans un encadrement typographique. Collationné complet. Les deux faux-titres sont bien présents.

Reliure strictement d'époque pleine basane marbrée caramel, dos à nerfs orné aux petits fers dorés, pièce de titre de papier orangé, tranches rouges, doublures et gardes de papier blanc. Reliure fraîche avec la coiffe de queue restaurée. Légers frottements et une épidermure atténuée au second plat. Intérieur frais.







Edition originale.

Ce sont les faux-titre qui portent le titre sous lequel cet ouvrage est connu : La Confidence nécessaire. Le tirage en a été de 1500 exemplaires selon la Revue des ouvrages de l'auteur (1784). Il y a des exemplaires avec une adresse différente pour la première partie. La seconde partie de notre exemplaire porte l'adresse de Cambridge (sans autre indication).






Ce roman par lettres, comme l'écrit Paul Lacroix, est dédié à miss Betty F**, jeune irlandaise, qui en aurait fourni les éléments, en racontant les aventures d'une de ses parents et en permettant à Restif de les publier, seulement après qu'elle fut retournée dans son île. Restif dit, dans une note de Monsieur Nicolas, tome IX (p. 2663), que la Confidence nécessaire fut sa première histoire déguisée. "Le sujet, dit-il ailleurs, tome XVI (p. 4553), était mes amours avec Marie Fouard, et mes velléités pour Marguerite Bourdillat, l'une brune, l'autre blonde. C'était l'extrait honnête d'un sottisier, que j'avais composé au Louvre (c'est à dire à l'imprimerie du Louvre, où il fut compositeur), dans mes moments d'effervescence. Ce n'est pas un historique de ce que j'avais fait avec ces deux filles ou avec Marie-Jeanne, qui souvent y était Alice, dans mes idées, mais un château en Espagne de ce qui aurait pu arriver." Cet ouvrage commencé pendant le voyage que fit Rétif à Sacy, en 1767, ne fut achevé qu'après son retour à Paris. C'est alors que l'auteur le mit au net et le porta au bureau de la police pour le faire examiner par la censure. Dans la déclaration du livre, un homme distrait ou malicieux inscrivit la Confession nécessaire, au lieu de la Confidence nécessaire, et le manuscrit fut envoyé à l'abbé Simon, bibliothécaire du comte de Clermont, abbé de Saint-Germain des Prés. L'abbé Simon ne devait pas être un censeur bien redoutable ; il se récusa pourtant et transmit le manuscrit à son collègue Marin, secrétaire de la librairie, lequel ne demanda que les changements convenables. Restif en garda une vive reconnaissance à Marin et confia son manuscrit à un libraire colporteur, nommé Kolman, qui le fit imprimer, mais qui ne donna pas un sou à l'auteur. « Je ne retirai rien de la Confidence nécessaire, dit Restif, ayant affaire à un coquin. » Restif s'était pourtant promis de vivre du métier d'homme de lettres, et il vécut, pendant quatre mois, avec les 3 louis que lui avait rapportés le petit roman de Lucile ! Le chevalier de Cubières, dans sa Notice sur Restif, fait remarquer que la Confidence nécessaire est une des compositions les plus erotiques de l'auteur. (Lacroix)

Il existe de ce texte deux autres éditions parues la même année 1769 (l'une d'elle est en réalité de 1778).







Cet ouvrage, l'un des premiers du jeune Rétif de la Bretonne devenu auteur depuis 1767 (La Famille vertueuse), parait la même année que le Pied de Fanchette.

"La Confidence nécessaire est une peinture de la situation de mon mon coeur lorsque, dans ma première jeunesse, j'aimais plusieurs filles à la fois : ce n'est pas une histoire véritable, mais c'est une situation vraie et un tableau fidèle. Cette production érotique (mots de Rétif) eut du malheur ; elle fut refusée du censeur, l'anné Simon ; je ne pus d'abord la vendre ... M. Lebrun fut le second censeur de la Confidence nécessaire ... Il n'était pas possible qu'un abbé approuvât un roman aussi gaillard. Je le lui présentai moi-même comme étant de mon domestique ; nous parlâmes de moi fort librement la seconde fois et je me desservis sans le vouloir. L'abbé renvoya mon manuscrit à Marin, secrétaire de la Librairie, dans l'intention de le faire supprimer ; mais ce censeur de la Police me le rendit bonnement en me conseillant d'y faire les changements convenables." (Monsieur Nicolas, tome X, p. 12 et 16).

Personne ne dit où a été exactement imprimé cette édition. D'après les ornements gravés sur bois présents dans le volume (filets, culs-de-lampe, bandeaux) il se pourrait que l'impression ait été faite en Suisse (Laussane ? Genève ? Neuchâtel ?). Une étude approfondie de ces ornements permettrait de s'en assurer avec plus de précision.

Références : Rives-Childs, IV, pp. 205-207 ; Lacroix, IV, n°1, pp. 92-95

Bel exemplaire en condition d'époque ce roman par lettres rare.

Prix : 2.000 euros

lundi 2 septembre 2024

Nicolas-Edme Rétif de la Bretonne [Restif de la Bretone]. Le Paysan et la Paysane pervertis ; ou les Dangers de la Ville ; Histoire récente, mise au jour d'après les véritables lettres des personnages. Imprimé à La Haie [Paris, Veuve Duchesne, imprimeur ?], 1784 (i.e. 1787). 16 parties reliées en 4 volumes in-12. Bon exemplaire en reliure ancienne.


Nicolas-Edme Rétif de la Bretonne [Restif de la Bretone]

Le Paysan et la Paysane pervertis ; ou les Dangers de la Ville ; Histoire récente, mise au jour d'après les véritables lettres des personnages. Par N-E. Rétif de la Bretone.

Imprimé à La Haie [Paris, Veuve Duchesne, imprimeur ?], 1784 (i.e. 1787)

16 parties reliées en 4 volumes in-12 (17 x 10 cm) de 542-(2), 536, 552 et 550-(2) pages.

Reliure ancienne (exécutée vers 1820) demi-basane blonde, pièces de titre de maroquin rouge, pièce de tomaison bleu nuit, tranches rouges. Reliure légèrement frottées, coins usés, frottements sur les plats recouverts à l'époque de papier couleur moutarde de Dijon. Petit accroc à la coiffe supérieure et mors fendillé au troisième volume (sans conséquence sur la solidité du volume). Intérieur assez frais, avec quelques rousseurs sans gravité. Collationné complet. A la fin du premier volume se trouve relié une variante (carton) de l'Avant-Propos (13 et 14 bis). Exemplaire qui n'a jamais reçu les gravures annoncées, comme presque toujours (voir ci-dessous).

Edition originale rare.


"Cette édition du Paysan et de la Paysanne fondus ensemble est fort rare, écrit Paul Lacroix sans sa bibliographie des éditions anciennes de Rétif de la Bretonne, et ne se trouve presque jamais avec la suite complète des gravures (120 gravures annoncées et qu'on trouve plus souvent avec les exemplaires du Paysan de 1782 et de la Paysanne de 1784). Paul Lacroix poursuit : "On peut affirmer que, si l'édition ne fut pas contrefaite, elle ne se vendit pas, quoique Restif y eût ajouté 16 petites nouvelles plus ou moins inédites. Il fallut la mettre au vieux papier ou du moins la vendre à vil prix, sans gravures."













Cette édition nouvelle qui est donc en réalité un nouveau ouvrage, a été imprimée entre mars 1783 et juillet 1785 (et mise dans le commerce après approbation au commencement de l'année 1787) et non en 1784 comme l'indique les titres. Comme l'indique encore Paul Lacroix, les journalistes qui n'avaient pas refusé d'accorder des comptes-rendus plus ou moins élogieux au Paysan et même à la Paysanne, jugèrent inutile de s'occuper de la fusion des deux romans en un seul (alors qu'il s'agit d'un ouvrage presque entièrement nouveau). Paul Lacroix poursuit : "L'Année littéraire fut peut-être la seule feuille périodique dans laquelle l'édition collective de ces romans ait été examinées et vivement critiquées".



Lacroix écrit encore : "Restif était surtout blessé qu'on comparât son Paysan-Paysanne aux Liaisons dangereuses de Laclos, en donnant toujours la préférence à ce dernier ouvrage (une comparaison dont Rétif aurait pu s'enorgueillir si elle n'avait été à son désavantage) : Plusieurs personnes, dit Rétif, ont feint de regarde cet ouvrage comme défavorable aux moeurs et l'ont comparé aux Liaisons dangereuses ! Cette comparaison est fautive, sous tous les points de vue, soit que l'on considère le plan ou le fonds des deux ouvrages, soit qu'on fasse attention aux caractères, soit enfin qu'on examine le style. Par le plan et par le fonds, le Paysan perverti diffère essentiellement des Liaisons dangereuses. Quel est le plan, la marche et le fonds de ce dernier ouvrage ? Son plan est de décrire toute la méchanceté de deux roués dans les deux sexes : un Valmont et une Merteuil. Sa marche est de présenter le développement de la noirceur de ces deux vilaines âmes, noirceur à la mode et plus commune qu'on ne pense, quoiqu'elle ne soit pas générale. Son fonds est absolument les moeurs atroces des scélérats du grand monde, de ces honnêtes gens sans principes, qui commettent les plus grands crimes sans remords et presque sans plaisir. Le Paysan perverti, également utile et effrayant, présent le tableau intéressant d'un jeune homme et d'une jeune fille pleins d'innoncence et de candeur, qui viennent bonnement à la ville, de l'aveu de leurs parents, dans des vues honnêtes et légitimes, avec d'excellentes dispositions, et qui s'y perdent par la séduction que leur beauté, leurs qualités même semblent attirer sur le frère et la soeur. Ils deviennent scélérats et perdus. On voit, par leurs lettres, la progression du vice, d'abord imperceptible au fond de leurs coeurs, et ensuite plus développé ; enfin, d'autant plus effronté que leur éducation ne leur a point appris à l'amabiliser. Et tel est le livre qu'il fallait à nos provinces, pour effrayer les bons pères de famille et leurs enfants eux-mêmes."


"L'édition collective des deux chefs-d'oeuvre de Restif eut un censeur secret, nommé de Sanci, qui exigea mi grand nombre de cartons, et qui fit tout pour empêcher la publication de ces livres.​ Il est vrai vrai que Restif ne se montrait pas trop docile aux exigences des censeurs." (Lacroix)


"On peut regarder cette édition comme le spécimen le plus complet de son système d'orthographe, avec l'accentuation et la ponctuation, qui n'appartiennent qu'à lui seul" (Lacroix)


"A la fin du tome IV, de la page 449 à 327, l'auteur a imprimé quatre juvénales : la Parure, les Femmes , les Coquettes, les Catins."

Références : Paul Lacroix, XXXIII, pp. 251-257 ; Rives-Childs, XXXII, pp. 298-301


Bon exemplaire en reliure ancienne de cette édition rare dite "Paysan-Paysane" de l'ouvrage chéri par son auteur.

Prix : 2.500 euros