mercredi 29 juin 2022

Nicolas Fromaget. Le Cousin de Mahomet (1751). 2 titres gravés, 2 vignettes et 6 figures hors-texte. Bel exemplaire relié plein maroquin signé Amand pour le bibliophile Léon Rattier.


[Nicolas FROMAGET]

Le Cousin de Mahomet.

à Constantinople, 1751 [Paris]

2 tomes reliés en 1 volume in-12 (14 x 9 cm - Hauteur des marges : 136 mm) de 204 et 247 pages. 2 feuillets blancs intercalés entre les deux tomes. Page de titre gravée et vignette gravée en tête de chaque tome (identique). 6 figures hors-texte gravées sur cuivre non signées (3 figures dans chaque tome).

Reliure plein maroquin Lavallière de la seconde moitié du XIXe siècle, signée Amand. Dos richement orné aux petits fers dorés, pièce de titre de maroquin rouge, pièce de millésime de maroquin vert, triple-filet doré en encadrement des plats, double-filet doré sur les coupes, large dentelle dorée en encadrement intérieur, doublures et gardes de papier peigne, tranches dorées sur marbrure. L'exemplaire n'a pas été lavé. Quelques rousseurs et salissures à quelques feuillets, sans gravité.

On ne sait presque rien de Nicolas Fromaget, son prénom même est une supposition... il mourut probablement en 1759. Il fut un ami de Alain-René Lesage, célèbre en son temps pour Les Aventures de M. Robert Chevalier dit Beauchesne et Gil Blas de Santillane, maître du picaresque à la française, et avec lequel il collabora à l’écriture de certaines pièces. Il écrivit sous son nom plusieurs ouvrages, mais seul Le Cousin de Mahomet ou la folie salutaire, écrit en 1742 et immédiatement victime de la censure, eut en son temps un certain succès. Il fut souvent réimprimé après 1750 et la censure le visait encore en 1770.

Jeune adolescent espiègle, revêche à l'autorité d'un pédant régent de collège et d'un père bourgeois, Parisien l'Ecolier délaisse son héritage pour une vie d'aventure. Il quitte Paris sous l'aile protectrice d'un convoi de bagnards pour un périple qui le mènera à Constantinople. Là, devenu esclave, il pénètre dans l'intimité des sérails.












Roman orientaliste et libertin pour les uns, roman picaresque pour les autres, Le Cousin de Mahomet est à la fois drôle et piquant. Il décrit la société de Ottomane de Constantinople avec une grande précision, au point qu'Octave Uzanne (qui a réédité ce texte en 1882) a cru que l'auteur y avait réellement vécu (ce qui ne semble pas être le cas). Le ton qu'il emploie est réaliste et dépasse allégrement les niaiseries libertines et les poncifs orientalistes. C'est par la voix des femmes que Fromaget entend railler l'oppression imbécile qui les accable, puisqu'elle pèse en retour et aussi bien sur tous les « honnêtes gens ». L'auteur s'est attaché particulièrement à décrire les scènes les plus galantes et les plus scabreuses auquel le héros a pris part. Ces scènes ainsi que la portée religieuse du texte ont contribué à faire condamner ce texte. Le Cousin de Mahomet suit la voie tracée par les Lettres persanes de Montesquieu (1721) et peut être considéré comme le digne cousin du Candide de Voltaire (1759).




Peter Nagy, dans son essai Libertinage et Revolution, n'a pas tort de considérer ce livre comme l'un des meilleurs dans la catégorie exigeante des récits d'aventures libertines (Jacques Domenech, Le Cousin de Mahomet de Nicolas Fromaget : un cousin du Candide de Voltaire)

Provenance : de la bibliothèque Léon Rattier avec son ex libris armorié "Abbatia Janduriarum" (château de Jeand’heurs​). Lire à son sujet l'article du site Histoire de la Bibliophilie, par Jean-Paul Fontaine, Léon Rattier (1824-1902), sous-préfet et riche héritier (en ligne).

Référence : O. Uzanne, Le Cousin de Mahomet, avec une notice bio-bibliographique, Paris, A. Quantin, 1882 ; Fromaget Nicolas, Le Cousin de Mahomet (1742), postface de Jacques Domenech, Toulouse, Anacharsis, 2007 ; Cohen, Livres illustrés du XVIIIe siècle, 414 (pour l'édition de 1750 qui donne les figures à Clavereau et la gravure à Fessard).

Bel exemplaire dans une fine reliure signée de Amand et de belle provenance.

Prix : 1.900 euros