mardi 11 février 2025

Jean LORRAIN | O. D. V. GUILLONNET (artiste illustrateur) | X. LESUEUR (graveur) | Jérome DOUCET (Préface). NARKISS. Paris, Edition du Monument, 1908. Première édition illustrée. Un des 50 exemplaires sur Japon avec 2 états des estampes. Superbe exemplaire parfaitement établi en reliure japonisante du rare tirage sur Japon avec suite.



Jean LORRAIN | O. D. V. GUILLONNET (artiste illustrateur) | X. LESUEUR (graveur) | Jérome DOUCET (Préface)

NARKISS

Paris, Edition du  Monument, 1908

1 volume petit in-4 (24,5 x 17,5 cm) de 34 feuillets non chiffrés (68 pages) avec un frontispice à l'eau-forte tiré en vert et or et 12 illustrations tirées en vert sur chine appliqué dans le texte et hors-texte. Couverture illustrée par Guillonnet imprimée en or sur fond vert et blanc (visage de Narkiss en grand entouré de fleurs de narcisses). Texte encadré en or avec attributs égyptiens.

Reliure plein vélin teinté marron avec grandes incrustations de papie-cuir japonais décoré en relief d'époque (fin XIXe siècle). Ces deux plaques de papier-cuir japonais mesurent 23,5 x 15,5 cm et sont en parfait état. La reliure a un dos lisse avec auteur et titre doré, petit fleuron doré (fleur art nouveau) et millésime doré en queue. Doublures et gardes de papier moiré or. Exemplaire relié sur brochure. Etui bordé de vélin teinté. (reliure moderne parfaitement réalisée dans le goût des reliures japonisantes fin de siècle). Parfait état de l'ensemble.



Première édition illustrée.

Tirage unique à 300 exemplaires.

Celui-ci, un des 50 exemplaires avec 2 états des estampes (l'état définitif dans le texte et un état sur Japon tiré en bistre (relié à la fin du volume), pour François Ferroud éditeur (numéroté à la plume et signé de sa main).

Il a été tiré 25 exemplaires sur Japon avec 3 états des figures et 225 exemplaires sur vélin à la cuve des papéteries d'Arches avec un seul état.



"Jean Lorrain (1855-1906) fut un écrivain prolifique et influent. Il tirera toutes les ficelles du décadentisme et sa culture de troubles dans les genres pour exprimer son amour tragique de la beauté. En 1892, il transpose le mythe de Narcisse en Égypte, ce sera Narkiss, publié comme conte d’été dans trois numéros du Journal. En 1902, il le fait figurer dans la section Princes de nacre et de caresse du recueil Princesses d’ivoire et d’ivresse. En 1908, Narkiss est réédité par les soins des Amis de Jean Lorrain aux éditions du monument à seulement 300 exemplaires." (Présentation de la réédition par les éditions Gay Kitsch Camp, Paul Cardon, en 2016).

Ce conte suit l'histoire de Narkiss, un jeune homme prince d'Egypte, d'une beauté troublante, dont l'existence est dominée par le culte de l'apparence et le narcissisme. Il évolue dans un monde d'artifice, de mondanités et de plaisirs raffinés, où le beau et le morbide se confondent. Comme son nom l'indique, le personnage évoque le mythe de Narcisse, condamné à l'adoration de son propre reflet.



La magnifique couverture emblématique de Guillonnet ainsi que les compositions tout au long de ce court texte, magnifient l'ensemble qui est d'une réalisation luxueuse et d'un rendu esthétique marquant. Le texte est imprimé en gros caractères majuscules entouré d'un filet doré avec attributs égyptiens. Le frontispice est grandiose de beauté symboliste et décadente, l'androgynie de Narcisse ne faisant que renforcer la préciosité du texte de Jean Lorrain.

















"Isis ! Narkiss ne s'était jamais vu. Si Narkiss avait pu contempler son image, il aurait vu le visage d'Isis et les prêtres, qui voulaient gouverner par Isis et ne voulaient plus être gouvernés par elle, redoutant l'heure où Narkiss se connaîtrait lui-même, retardaient de jour en jour le moment de la révélation. En apprenant sa beauté le Pharaon apprendrait sa force, son origine et sa puissance; il fallait lui ôter toute énergie avant sa fatidique rencontre avec lui-même, il fallait faire une idole et non un roi du Pharaon. C'est dans ce but qu'on l'avait déjà enlevé à sa mère, soustrait au peuple et dérobé aux conseils des grands." (extrait)



Superbe exemplaire parfaitement établi en reliure japonisante du rare tirage sur Japon avec suite.

Prix : 4.200 euros

samedi 8 février 2025

La Nuit et le Moment par Crébillon Fils magistralement illustré à l'eau-forte en couleur par Louis Icart (1946). Un des 15 exemplaires d'artiste sur papier Johannot. Exemplaire avec 3 suites supplémentaires dont 2 suites sur Japon et une suite sur Arches. Bien complet des 5 eaux-fortes libres tirées sur Arches. Superbe et rare.


CRÉBILLON Claude-Prosper Jolyot de, dit CRÉBILLON fils | Louis ICART, illustrateur

LA NUIT ET LE MOMENT imagé de vingt-cinq eaux-fortes originales, en couleurs, par Louis Icart.

Georges Guillot, éditeur, Paris, 1946

1 volume grand in-4 (29,2 x 23,2 cm) en feuilles sous couverture rempliée de l'éditeur titrée en rouge sur le premier plat, de (4)-161-(7) pages. Avec 19 eaux-fortes en couleurs dont 17 à pleine page intercalées dans le texte et 2 en vignettes (bandeau et cul-de-lampe), 1 eau-forte pour l'Avant-Propos (avec fac-similé de l'écriture de Louis Icart) et 5 eaux-fortes libres en couleur, soit 25 eaux-fortes en couleurs au total (plus les épreuves dont le détail est donné ci-dessous). Parfait état. Sans emboîtage.



Tirage à 540 exemplaires.

Celui-ci, un des 15 exemplaires d'artiste sur papier vélin à la forme des papeteries Johannot (n°VIII) avec épreuves supplémentaires sur divers papiers et en divers états.



Cet exemplaire contient :

- La suite des 20 planches en couleurs dans le texte (dont 19 pleines pages et 2 mi-pages) sur vélin de cuve des papeteries Johannot

- La suite de 5 planches libres tirées sur Arches.

- Une suite complète des 25 planches (20 planches du livre + 5 planches libres) tirée en bistre sur Japon.

- Une suite complète des 25 planches (20 planches du livres + 5 planches libres) à l'état d'eaux-fortes pures tirées en noir sur Japon.

- Une suite complète des 18 planches (planches du livre) tirées en couleurs sur Arches.

Soit un total de 93 planches.

Les suites sur Japon en bistre et en noir avant la lettre, bien complètes des 5 planches libres, sont très rares. Il n'y a eu que 15 exemplaires tirées sur ce Japon hormis les quelques exemplaires d'artiste.

Parfait état de l'ensemble.













L'illustration délicate et subtilement libre donnée par Louis Icart pour cet ouvrage galant du XVIIIe siècle peut être considérée comme un chef d'œuvre du genre. La mise en couleurs des eaux-fortes confère à ce volume un charme puissant. Le papier, la typographie en deux couleurs (noir et rouge) et la mise en page sont autant d'atouts supplémentaires pour faire de ce livre érotique l'un des plus beau livre de bibliophilie de son époque.

La Nuit et le Moment est un dialogue de Crébillon fils écrit en 1755. Un soir, Clitandre vient dans la chambre de Cidalise pour échanger avec elle mais celle-ci est surprise de sa venue : un dialogue commence entre les deux personnages. Comme l'écrit Patrick Wald Lasowski, professeur à l’université Paris VIII, spécialiste de la littérature du XVIIIe siècle, auteur notamment du Roman libertin du XVIIIe siècle, La Nuit et le Moment est un "ébat de langage", Crébillon fils y met en scène la parole des deux protagonistes. "Comprenant tout ce que l’amour physique suppose, préliminaires, détours, accélérations, et ralentissements. Crébillon modifiant son texte pendant des années, disait garder là le meilleur. Les corps sont abstractions, le décor d’un minimalisme ultra-contemporain, l’époque à l’interrogation des mœurs." précise-t-il encore.

















Louis Icart (1888-1950) fut un illustrateur et peintre français connu pour ses œuvres élégantes et sensuelles, souvent associées à l'Art Déco. Il commence sa carrière dans la mode avant de se tourner vers la gravure et la peinture, capturant la féminité avec des portraits glamour et romantiques de femmes dans des scènes sophistiquées. Sa technique de gravure à la pointe-sèche et son style raffiné ont fait de lui un artiste très prisé dans les années 1920-1940. Louis Icart illustra également plus d'une trentaine d'ouvrages, notamment des classiques de la littérature française comme Rabelais, entre autres et un certain nombre d'ouvrages érotiques. Bien que tombé dans l'oubli après sa mort, il connaît une redécouverte au XXe siècle grâce à des collectionneurs passionnés.

Parfait exemplaire, en feuilles, tel que paru, à l'état de neuf avec toutes les épreuves en parfait état, de ce superbe livre illustré recherché et coté, surtout dans cette condition et dans ce tirage rare et aussi riche en états divers.

Prix : 4.500 euros

jeudi 6 février 2025

HARAUCOURT (Edmond)‎ | LUNOIS (Alexandre) [Octave UZANNE] LA MADONE | [Paris, Les Bibliophiles Contemporains, Académie des Beaux Livres, 1894.] Edition originale. Tirage à part de l'un des quatre textes composant L'Effort d'Haraucourt et publié en 1894 pour les Bibliophiles Contemporains. Tirage unique limité à 180 exemplaires. Avec relié en tête une très belle aquarelle originale pleine page par l'artiste Alex. Lunois. Superbe exemplaire avec aquarelle originale signée et luxueusement relié à l'époque par Charles Meunier pour le bibliophile Eugène Renevey.

HARAUCOURT (Edmond)‎ | LUNOIS (Alexandre) [Octave UZANNE]

LA MADONE

[Paris, Les Bibliophiles Contemporains, Académie des Beaux Livres, 1894.]

1 volume in-4 (28,2 x 22,5 cm) de (1)-18-(2) pages. 17 encadrements de pages lithographiés en couleurs par Alex. Lunois et 1 vignette pour l'achevé d'imprimer (verso du dernier feuillet). Avec une grande aquarelle originale pleine page signée placée en tête du volume. Avec 4 feuillets blancs placés avant et après le texte (papier filigrané au nom de l'auteur dans un encadrement le tout spécialement fabriqué pour cette édition.

Reliure strictement de l'époque plein maroquin turquoise, dos à quatre nerfs sautés, auteur et titre dorés au dos (très mince) dans un encadrement de filet doré, encadrement de filets dorés sur les plats avec volutes d'angles, encadrement intérieur de maroquin mosaïqué de nuages de maroquin ivoire le tout parsemé d'un semé d'étoiles argentées de deux tailles différentes, doublures et gardes de papier marbré, tranches dorées sur brochure (reliure signée CH. MEUNIER). Très bel état de conservation. Le dos est uniformément insolé (viré au turquoise-vert). Intérieur parfait.


Edition originale.

Tirage à part de l'un des quatre textes composant L'Effort d'Haraucourt et publié en 1894 pour les Bibliophiles Contemporains.

Tirage unique limité à 180 exemplaires, celui-ci ne comporte pas le feuillet de justification de tirage qui était réservé bien évidemment à l'édition complète de l'ouvrage.

Avec relié en tête une très belle aquarelle originale pleine page par l'artiste Alex. Lunois (La Madone portant une cruche)


Imprimé sur beau papier d'Arches filigrané en marges (frise florale et noms de l'auteur et de la collection) conçu par Octave Uzanne, le directeur fondateur de la Société.

L'ouvrage complet se compose normalement comme suit : Collection de quatre contes : La Madone, illustré de 18 lithographies originales d'Alexandre LUNOIS - L'Antéchrist, illustré de 38 compositions d'Eugène COURBOIN, aquarellées - L'Immortalité, illustré de 32 compositions de Carlos SCHWABE, dont 10 gravées à l'eau-forte en noir (par Massé) et 23 grands motifs floraux aquarellés.- La Fin du Monde, illustré d'un frontispice tiré en or et de 46 grands dessins d'Alexandre SEON. La couverture, les faux-titres, justification et titre sont entièrement orné de grandes compositions en couleurs de Léon RUDNICKI.




Notre exemplaire est un tirage à part du conte LA MADONE seule, illustré par Alexandre Lunois. Il a été relié ainsi pour l'amateur bibliophile Eugène Renevey.

Ce genre de tirage relié à part ne devait être qu'une exception et une coquetterie d'amateur. Nous avons cependant pu constater le même type d'exemplaire pour ce même livre avec le conte illustré par Carlos Schwabe (L'immortalité).

Octave Uzanne, en tant que maître d'oeuvre, signe ici l'une des plus belles productions pour les Bibliophiles contemporains. C'est un livre qui est aujourd'hui de plus en plus remarqué et recherché par les amateurs.

La Société des Bibliophiles Contemporains fondée par Octave Uzanne à la fin de l'année 1889 va mal en 1894. Le Président-Fondateur n'est plus en odeur de sainteté pour une partie non négligeable des membres de cette petite chapelle bibliophilique, aussi dénommée Académie des Beaux Livres. Certains accusent Octave Uzanne d'agir à sa guise, en despote, sans tenir compte de l'avis des membres. Octave Uzanne finira par jeter l'éponge et demandera la dissolution de cette assemblée cette même année. Plusieurs ouvrages de qualité auront néanmoins vu le jour pendant les quelques années d'activité de cette société de bibliophiles esthètes, sous la direction d'Octave Uzanne, principal animateur et promoteur de l'esprit qui l'a fait vivre.










Cette nouvelle La Madone a paru pour la première fois en 1890 dans la Revue Bleue (N°17 - Tome 45 - 26 avril 1890).

"Il y avait autrefois - voici bien longtemps de cela un peintre qui possédait une grande âme d'artiste et chérissait son art par-dessus tout. Il l'adorait et le cultivait, pour lui-même : il y voyait un but et non pas un moyen, le terme de la vie et non la route qui conduit vers la fortune ou vers la renommée. Jamais, d'ailleurs, il n'avait pesé ni raisonné cette façon de sentir; il l'éprouvait naïvement et vivait selon sa nature ; quand il avait conçu le beau, il tâchait à le réaliser, et y travaillait avec ferveur, sans souci du bien ou du mal que l'on en pourrait penser autour de lui. Il cherchait, il aimait, c'est-à-dire qu'il se cherchait lui-même et qu'il aimait son rêve. Ceci l'avait promptement mené à la solitude : vivre en soi, c'est vivre loin. Il était donc suffisamment dédaigné, et son mérite était si grand que nul n'avait l'idée d'y croire.​ [...] Or, un soir, à l'heure où les troupeaux rentrent aux étables, il arriva près d'une fontaine aux portes de la ville. Une jeune fille avait déposé à terre ses cruches pleines, et, avant de reprendre son chemin, se reposait, assise sur la margelle de pierre. Au-dessus d'un torse frêle, son visage grave et triste, éclairé par les reflets du couchant, se découpait sur le fond d'un ciel d'or, et le soleil bas, caché derrière elle, dispersait vers les nues des clartés frémissantes : les rayons, tamisés dans les cheveux blonds de l'enfant, lui faisaient un nimbe mobile, et, dans cette gloire de lumière, elle ressemblait aux saintes du paradis. Il s'approcha pour l'examiner plus à l'aise : elle ne bougea point, et ne le vit pas, absorbée sans doute en quelque méditation: elle avait le front uni, le nez fin, les yeux droits, la bouche sans sourire. Austère comme le soir, elle était en harmonie avec lui, faisait partie de lui, le complétait, et, poétisée par lui, le poétisait à son tour. Elle dégageait de la religion. [...]" (extrait)


"Alexandre Lunois est de naissance parisienne, mais de souche normande. L'observateur, doué d'un rien de malice caustique et d'un soupçon de finesse avertie, atteste ces origines dans ses oeuvres. Il a, du Parisien, l'esprit railleur et curieux, et son intelligence est rompue à toutes subtilités du métier, comme les vieux Normands se complaisent aux difficultés et arguties. Mais Lunois n'est pas un parisien d'annexion, il a vu le jour dans le vieux Paris historique, le vieux Paris dont chaque rue évoque un lambeau d'histoire, dont chaque maison offre le florilège de cent anecdotes vivantes. [...]" (extrait)​ Alexandre Lunois est par excellence l'artiste de la femme et de l'Orient, son oeuvre est vaste et colorée. Il a participé à l'élaboration de deux ouvrages importants publiés par Octave Uzanne : Les Contes Choisis de Maupassant (1892) où il illustre le conte intitulé L’Épave et L'Effort d'Edmond Haraucourt (1894) où il illustre La Madone. Il meurt en 1916 à l'âge de 53 ans.

Provenance : de la bibliothèque d'Eugène Renevey (1847-1923) (ingénieur des mines et grand administreur industriel - Société d'électro-métallurgie de Dives) avec son ex libris tiré à part sur Chine (volant). La bibliothèque d'Eugène Renevey sera vendue en mai 1924. Sa bibliothèque était très riche en reliures d'art des plus grands noms de la reliure et de livres enrichis d'aquarelles originales (comme ici). Eugène Renevey était également un grand collectionneur d'estampes. Né de père inconnu d'une mère célibataire qui était lingère, Eugène Renevey entre dans la catégorie très restreinte des bibliophiles issus des classes populaires. On comprend alors mieux la devise de son ex libris et l'illustration qui l'accompagne "Qui peine gagne" accompagné d'un laboureur menant sa vache et la charrue dans son champs.

Superbe exemplaire avec aquarelle originale signée et luxueusement relié à l'époque par Charles Meunier pour le bibliophile Eugène Renevey.

Prix : 3.800 euros