jeudi 9 mai 2024

Rétif de la Bretonne [Restif de la Bretone]. Philosophie de Monsieur Nicolas (1796). Edition originale rare. Exemplaire broché à toutes marges, en grande partie non coupé. Très rare dans cette condition.



Nicolas-Edme Rétif de la Bretonne [Restif de la Bretonne]

Philosophie de Monsieur-Nicolas. Par l'Auteur du Coeur-Humain-Dévoilé [Rétif de la Bretonne].

A Paris, De l'Imprimerie du Cercle-Social [Bonneville], 1796. L'an V de la République Française.

3 parties en 3 volumes in-12 (18,4 x 11 cm) 
brochés de XLIV-264, (4)-284 et 268 pages. Couvertures de papier à la colle moutarde (datant de 1842). Exemplaire broché non rogné et en grande partie non coupé. Papier fin de médiocre qualité mais pratiquement sans rousseurs. Caractères typographiques de médiocre qualité comme pour tous les exemplaires de ce livre. Boîte-étui de conservation demi-chagrin bordeaux et percaline (moderne) ; le doreur a fait une erreur au dos de l'emboîtage en dorant "Philisophie de M. Nicholas" (Nicholas avec un h).



Edition originale rare.

« Je ne parle pas, dit Restif, de deux manuscrits que j'ai composée cette année 96, ni des peines que je me suis données pour la mise en ordre de ma Philosophie en six petits volumes, dont Bonneville a imprimé les trois premières parties, contenant la Physique. Il en reste trois : la Morale, la Politique, et la Religion ; puissé-je avoir le courage et les moyens de les mettre au jour ! » (Monsieur Nicolas, t. XI, p. 114-115).

« Le titre de la Philosophie de Monsieur Nicolas aurait quelque obscurité, sans un mot d'éclaircissement. C'est une oeuvre à part, et qui cependant fait partie d'un ouvrage considérable, important, unique dans notre littérature, intitulé : Monsieur Nicolas, ou le Cœur humain dévoilé. [...] L'auteur du Cœur humain dévoilé ne s'est pas contenté de son histoire morale, que nous allons publier, si nous sommes faiblement aidés par les amateurs de la vraie littérature ; il a fait plus, il expose ses idées sur un système complet de l'Univers, aussi propre à amuser que le meilleur roman. [...] Il aurait été peut-être plus naturel de publier le Cœur humain dévoilé avant la Physique. Mais l'éditeur ne connaissait pas le premier ouvrage, que le second lui a donné l'envie de lire. » (philosophie de Monsieur Nicolas, t. I, p. V-VII.)










« Une note, divisée en trois parties et imprimée au verso des trois volumes de cet ouvrage, sous le titre d'Idée du Système du monde, semble prouver, de la manière la plus certaine, que Restif n'est pas l'auteur d'un livre qu'on lui attribuait, et dont il n'était que l'éditeur responsable ; cette note se termine par le paragraphe suivant : « Système signifie assemblage ; ainsi, mon système de Physique est l'assemblage des vérités qu'a découvertes M. Nicolas. » Il résulte, de ce paragraphe, que Restif ayant émis des opinions toutes nouvelles sur la cosmogonie et sur la Nature, non-seulement dans la Découverte australe, mais encore dans plusieurs de ses ouvrages, tels que l'École de la jeunesse, le Marquis de T*, etc., un admirateur de ses idées les a fidèlement rassemblées dans l'ouvrage qu'il intitule Philosophie de Monsieur Nicolas, et qu'il publie, de concert avec Restif, qui s'est donné le plaisir d'y ajouter quelques pages de sa façon. Il est très-probable que son ami, Nicolas de Bonneville, qui était alors à la tête de l'imprimerie du Cercle social, est le véritable auteur ou rédacteur de ces trois volumes. On peut aussi en attribuer une part au citoyen Arthaud, qui s'occupait d'astronomie, et que Restif nous présente comme son excellent ami. (Voy. tome Ier, pag. 59.) » (P. Lacroix, Bibliographie des ouvrages de Rétif de la Bretonne, p. 407. On peut aujourd'hui douter de ce qu'écrivait Lacroix en 1875 tant les vues et les idées défendues dans ces trois volumes sont tout à fait dans le goût de ce qu'a pu produire Rétif de plus étrange et insensé quant au systère du monde qu'il défendait.

« L'impression de l'ouvrage ne semble pas même avoir été faite sous les yeux de Restif, puisqu'on n'y découvre aucune trace de ses habitudes orthographiques, si ce n'est dans le titre où il a maintenu son système de traits-d'union entre les mots. C'est donc Bonneville qui a fait respecter l'orthographe régulière et académique de l'imprimerie du Cercle social. C'est Bonneville qui, dans tous les cas, a écrit la préface qu'il intitule Éclaircissements et qu'il consacre à louer sans réserve le génie de Restif et son chef-d'oeuvre encore inédit : le Cœur humain dévoilé : « L'auteur du Cœur humain dévoilé, dit-il, ne s'est pas contenté de son histoire morale, que nous allons publier, si nous sommes faiblement aidés par les amateurs de la vraie littérature ; il a plus fait, il expose ses idées sur un Système complet de l'Univers, aussi propre à amuser que le meilleur roman. » La Philosophie de Monsieur Nicolas n'est donc, en quelque sorte, qu'un prospectus du Cœur humain dévoilé, auquel on souscrivait à l'imprimerie du Cercle social, pour 12 volumes, prix 24 livres : « Les 8 premiers volumes de cet ouvrage, ajoute une note placée à la suite de la table des matières de la Philosophie de Monsieur Nicolas, étant depuis longtemps composés à la casse par l'Auteur et imprimés en secret, seront délivrés aux souscripteurs, dès que son 9e volume, qui est sous presse, sera imprimé en entier. » ((P. Lacroix, Bibliographie des ouvrages de Rétif de la Bretonne, p. 408.

Paul Lacroix s'étend longuement sur cet ouvrage dans sa Bibliographie parue en 1875 chez le libraire Auguste Fontaine. Ce n'est pas certain pourtant que tout soit juste dans ce qu'il avance. Paul Lacroix avait le goût de la broderie et l'affabulation facile.

« Cette œuvre contient, entre autres, un amusant passage qui en dit long sur la naïveté de Restif, dont ce dernier possédait une dose peu commune, et selon lequel Frédéric II aurait procédé à des expériences d'accouplement d’hommes avec des cochons, mariant ensuite les produits en ayant résulté avec des humains ; « au bout de trois générations, les descendants étaient presque entièrement décochonnées » nous dit Restif. Notre Nicolas s'en sera une fois de plus laissé conter » (Jean-Claude Courbin).

« C’est l’ouvrage le plus raisonnable qu’on puisse faire entrer dans une bibliothèque des Fous, telle que Charles Nodier en avait tracé le plan ; il a sa place à côté du Voyage dans la lune, de Cyrano de Bergerac » (Lacroix)

Références : J. Rives Childs, Restif de la Bretonne. Bibliographie, p. 330 ; P. Lacroix, Bibliographie des ouvrages de Rétif de la Bretonne, p. 407-413 ; Monselet, n° 41, pp. 181-182.






Dans cet ouvrage à la science originale, Rétif aborde dans de courts chapitres numérotés de 1 à 476. Il y aborde divers points de la Physique du globe, la genèse des planètes, les étoiles, la terre, les hommes, sur les animaux, sur les végétaux, etc. Plutôt que Philosophie de Monsieur Nicolas il aurait été plus judicieux d'intituler ces trois volumes : Physique de Monsieur Nicolas, titre qui se retrouve d'ailleurs en guise de titre courant pour les trois volumes.

Dans cet ouvrage pseudo-scientifique, les digressions de Rétif sont cependant souvent (comme toujours) très nombreuses et on peut lire ainsi à la fin du troisième volume : "Je ne sais si l'homme peut prescrire aux femmes leur costume ! Leur instinct de plaire ne vaudrait-il pas mieux que nos leçons ? ... Non, non ; c'est nous qui sentons ce qui nous charme. Cependant, qu'au fond, ce soient toujours les femmes qui soient législatrices du goût, pour leur sexe. Qui n'a pas recontré, dans Paris, de ces déesses du goût, que tous le monde admire, et qui font s'écrier : "Que de goût : que de grâces ! comme tout lui va" ! Voilà celles qui seraient les types, les modèles, pour tout leur sexe. Des Préposées empêcheraient que ce goût exquis ne s'abatardit, de dégénérât. [...]" (extrait vol. 3 p. 260-261.

Le présent exemplaire révèle un détail intéressant. En effet, le papier à la colle qui a servi à confectionner les couvertures des trois volumes a été doublé en partie avec des défaits ou rebuts d'imprimerie provenant d'un ouvrage imprimé en 1842 (pages de titre d'un ouvrage imprimé à Tours). Preuve s'il en était encore besoin que bien des ouvrages de Rétif de la Bretonne avaient été conservés en feuilles et remisés dans des greniers ou des granges en attendant des jours meilleurs. Par ailleurs on notera qu'au moment du brochage des volumes, en 1842 ou quelques années plus tard, on a pris soin de faire imprimer des pièces de titre au nom de "Restif de la Bretonne" et de la "Philosophie de Monsieur Nicolas".

Bel exemplaire de cet ouvrage rare et curieux, resté broché non rogné, en grande partie non coupé.

Prix : 3.800 euros

mardi 7 mai 2024

[Nicolas-Edme Rétif de la Bretonne | Restif de la Bretone] Ingénue Saxancour, ou La Femme séparée : Histoire propre à démontrer, combien il est dangereux pour les Filles, de se marier par entêtement, et avec précipitation, malgré leurs Parens : Ecrite par elle-même. A Liège, et se trouve à Paris, chés Maradan, Libraire, rue des Noyers, N°33. 1789 3 parties reliées en 2 volumes in-12. Edition originale très rare. Bon exemplaire conservé dans sa première reliure de cette rareté bibliophilique.


[Nicolas-Edme Rétif de la Bretonne | Restif de la Bretone]

Ingénue Saxancour, ou La Femme séparée : Histoire propre à démontrer, combien il est dangereux pour les Filles, de se marier par entêtement, et avec précipitation, malgré leurs Parens : Ecrite par elle-même. [Première Partie | Seconde Partie | Troisième Parie].

A Liège, et se trouve à Paris, chés Maradan, Libraire, rue des Noyers, N°33. 1789

3 parties reliées en 2 volumes in-12 (17 x 10 cm) de 248, (4)-240 et (4)-260 pages.

Reliure strictement de l'époque demi-basane marron, dos lisses, pièces de titres de maroquin marron et tomaison sur fond noirci, plats recouverts de papier vert. Frottements d'usage sur les plats et sur les coupes, mors partiellement fendu en queue du premier volume (sans incidence sur la solidité de la reliure). Intérieur collationné complet. Les 4 feuillets non chiffrés "Prospectus pour les Provinciales" qui se trouvent normalement à la fin de la dernière partie n'ont ici pas été reliés. Mouillures claires et sans gravité au début du premier volume. Rousseurs éparses, plus marquées dans la deuxième moitié de la permière partie jusqu'au début de la seconde partie. Le deuxième volume (troisième partie) n'a pas de rousseurs ni taches marquées (quelques pâles mouillures claires). Petites déchirures marginales ou plis sans gravité.


Edition originale très rare.


Voici ce qu'écrit Rives-Childs à propos de l'histoire d'Ingénue Saxancour : "Ingénue fut commencée le 18 mars 1786 ; Restif y travaillait pendant les mois de juin et de juillet (Mes Inscripcions, p. 179, 186, 211-226). "Une des plus délicieuses connaissances que Restif ait faite dans sa vieillesse, était celle de Mlle Laruelle. Elle lui racontait son histoire et Restif rapportait une partie des horreurs avec son mari, sous le nom de M. Moresquin, dans son ouvrage. Restif le composait en amalgamant l'histoire de Mlle Laruelle avec celle de sa fille aînée, mariée au monstre, L'Echine. Ce fut à la prière de Mlle Laruelle, "cette adorable amie", qui lui rappelait Mme Parangon, qu'il imprimait Ingénue Saxancour. Ce livre consolait l'âme profondément ulcérée de Mlle Laruelle, morte à trente-deux ans, de la poitrine, à Villoison, entre les bras de ma fille aînée (car nous sommes soeurs, étant réunies dans le même livre de ton père, et y ayant tellement les mêmes aventures, que ton mari a crû se reconnaître dans le mien) ; je suis vengée, puisque le livre est vendu ; il a fait horreur, sous son éxécrable nom... je meurs contente ; et je dois cette satisfaction à mon ami votre père." Et elle expira." D'autre part, Restif décrit l'ouvrage comme la suit de la Femme infidèle. "Ma fille aînée, dit-il, y fait son histoire, depuis son enfance jusqu'à son mariage, et sa séparation d'avec l'exécrable L'Echine. Elle y raconte ses premières aventures ; elle rapporte une pièce de moi, initulée le Loup dans la bergerie, ou la Marchande de modes. Elle raconte ensuite ce qu'elle a eu à souffrir d'Agnès Lebègue (sa mère, épouse de Rétif). Mais quand elle en est parvenue à son mariage, ses récits font horreur. On sait déjà, et j'en ai convenu dans mon histoire, que toutes ces infamies n'appartiennent pas à l'Echine ; mais qu'elles sont un amalgame de celles commises sur une dame Moresquin, grande et superbe femme, et sur ma fille aînée. Cette dame (qui se faisait appeler Laruelle, et non Moresquin) avait été vendue, prostituée dans un mauvais lieu, etc. Ingénue, en vertu de la sage et sainte loi du divorce, a enfin divorcé, en 1794, d'avec le vil l'Echine, et s'est remariée au citoyen Vignon, avec lequel elle est tranquille." (Mes Ouvrages, p. 158-159.)"








Suivant Paul Lacroix, "cet ouvrage est le plus rare de tous ceux de Restif, soit que l'édition ait été détruite en bloc, soit que les exemplaires aient été recherchés systématiquement pour être détruits l'un après l'autre... L'édition entière a dû subir des retranchements.. et les pages 249-252 du tome III manquent presque toujours" (elles sont bien présentes dans notre exemplaire).







C'est seulement en octobre 1789 qu'Augé, dit L'Echine, eut connaissance de l'ouvrage, dans lequel il était mis au pilori ; il dénonça donc son beau-père et l'accusa d'être l'auteur d'Ingénue Saxancour, de la Femme infidèle, Dom Bougre et autres livres du même genre. Nous trouvons tout le procès y relatif consigné par Restif dans les Nuits de Paris (tome XV, p. 193-237).

"Le roman d'Ingénue Saxancour était une satisfaction morale et un plaisir de vengeance, que Restif avait voulu se donner ; car l'ouvrage, quoique imprimé, n'eut aucune espèce de publicité et demeura caché dans l'imprimerie de l'auteur." (Lacroix)

Références : Rives-Childs, n°XXXV, pp. 307-309 ; Lacroix, pp. 313-319

Bon exemplaire conservé dans sa première reliure de cette rareté bibliophilique.

Prix : 8.000 euros

mardi 30 avril 2024

Les Charactères des Passions. Par le Sieur de la Chambre, médecin de Monseigneur le Chancelier. A Amsterdam, chez Antoine Michel, l'An 1658 [i.e. Daniel Elzévier, Amsterdam]. Ensemble complet des 5 parties reliées en 3 volumes petit in-12. Reliures signées THIBARON-JOLY (exécutée entre 1874-1885). Superbe exemplaire, complet de toutes les parties, parfaitement conservé.


CUREAU DE LA CHAMBRE, Marin

Les Charactères des Passions. Par le Sieur de la Chambre, médecin de Monseigneur le Chancelier.

A Amsterdam, chez Antoine Michel, l'An 1658 [i.e. Daniel Elzévier, Amsterdam]

1 fort volume petit in-12 (139 x 85 mm | hauteur des marges : 133 mm) de (24)-599 pages, avec titre-frontispice gravé à l'eau-forte.

Suivi de :

Les Charactères des Passions. Volume III et IV. Où il est traité de la Nature et des Effets de la Haine et de la Douleur : Par le Sieur de La Chambre, Conseiller du Roi en ses Conseils, et son Médecin ordinaire.

A Amsterdam, chez Antoine Michel,  1662 [i.e. Daniel Elzévier, Amsterdam]

1 volume petit in-12 (139 x 82 mm | hauteur des marges : 133 mm) de (8)-397 pages. Titre à la sphère armillaire.

Suivi de :

Les Charactères des Passions. Dernier Volume. Où il est traité de la Nature et des Effets de des Larmes, de la Crainte, du Désespoir. Par le Sieur de La Chambre, Conseiller du Roi en ses Conseils, et Premier Médecin ordinaire de sa Majesté.

A Amsterdam, chez Antoine Michel,  1663 [i.e. Daniel Elzévier, Amsterdam]

1 volume petit in-12 (139 x 82 mm | hauteur des marges : 133 mm) de 323 pages. Titre à la sphère armillaire compris dans la pagination.

Ensemble complet des 5 parties reliées en 3 volumes petit in-12.

Le premier volume contient les volumes I et II avec : L'Amour, La Joie, Le Rire, Le Désir, L'Espérance, La Hardiesse, La Constance, La Colère, et De la Connaissance et de l'Instinct des Animaux.

Le second volume qui contient les parties III et IV avec : La Haine et la Douleur.

Le troisième et dernier volumne contient la cinquième et dernière partie avec : Les Larmes, La Crainte et Le Desespoir.

Reliure uniforme plein maroquin vert sombre, auteur, titre et tomaison dorés aux dos, millésime dorés en queue des dos "ELZEV. 1658 | 1662 | 1663". Double-filet doré sur les coupes, dentelle dorée en encadrement intérieur des plats, doublures et gardes de papier peigne, tranches dorées sur marbrure. Reliures signées THIBARON-JOLY (exécutée entre 1874-1885). Exemplaire parfaitement conservé. Le premier volume est imprimé sur papier plus fort.


Nouvelle édition. 
Edition Elzévirienne.

Marin Cureau de La Chambre est né à Saint-Jean-d'Assé (Sarthe, Pays de Loire) en 1594 et est mort à Paris le 29 novembre 1669. Il fut médecin et philosophe, conseiller et médecin de Louis XIV. On ne sait rien de sa jeunesse et de ses études. On le trouve médecin au Mans vers 1630. Il vient ensuite à Paris où il se lie avec le Chancelier Séguier et devient son médecin. Il fréquente les salons de Madame de Scudéry et de la marquise de Sablé. Les Précieuses bénéficient de ses qualités de "psychologue" avant la lettre. Il devient l'un des premiers membres de l'Académie française en 1634. Il devient médecin du roi Louis XIV vers 1642 et achète la charge de médecin ordinaire du roi en 1650. Louis XIV lui témoigne une affection particulière. On rapporte que le roi « était si persuadé du talent de ce médecin habile pour juger du caractère des gens d’après leur physionomie, que ce monarque n’était souvent déterminé dans ses choix qu’après avoir consulté cet oracle. » En 1666, il devient l’un des premiers membres de l’Académie royale des sciences.

Parallèlement à ses activités médicales et mondaines, Marin Cureau de La Chambre mène durant toute sa vie une réflexion philosophique sur l’homme, sa physiologie et sa psychologie. Il dit à propos de ses Caractères des passions, paru en cinq volumes entre 1640 et 1662 : « [C’est un livre] où je veux examiner les Passions, les Vertus & les Vices, les Mœurs et les Coûtumes des Peuples, les diverses Inclinations des Hommes, leurs Tempéramens, les Traicts de leur visage ; en un mot où je prétends mettre ce que la Médecine, la Morale & la Politique ont de plus rare et de plus excellent. »

On doit à Cureau de La Chambre plusieurs ouvrages philosophies et scientifiques dont Nouvelles pensées sur les causes de la lumière, du desbordement du Nil et de l'amour d'inclination (1634), Nouvelles conjectures sur la digestion (1636), Traitté des libertez de l'Église de France (1639), Les Charactères des passions (5 volumes, 1640-1662), Nouvelles observations et conjectures sur l'iris (1650), Discours sur les principes de la chiromancie (1653), L'Art de connoistre les hommes (3 volumes, 1659-1664-1666), La Lumière (1662), etc.







Avec ses Charactères des Passions, Cureau de La Chambre s'inscrit en parallèle à Descartes et son Traité des Passions de l'Âme paru en 1649. Les deux ouvrages sont cependant très différents et Cureau se déclarait ouvertement l'adversaire de Descartes et des ses idées (Willems). Dans son épître au chancelier Séguier placée en tête du premier volume des Caractères des passions, Cureau de La Chambre présente l’ensemble à venir comme premier volet d’un art de connaître les hommes selon des règles empruntées à la médecine, la morale ou la politique et fondées sur une même loi de ressemblance (physiognomonie, morphologie humaine, animale, sexuelle, et « climatique » comparée…). Dès la toute première phrase, les passions sont définies comme langage : La Nature ayant destiné l’homme pour la vie Civile, ne s’est pas contentée de lui avoir donné la langue pour découvrir ses intentions ; elle a encore voulu imprimer sur son front et dans ses yeux les Images de ses pensées, afin que s’il arrivait que sa parole vînt à démentir son cœur, son visage pût démentir sa parole. (in Topologie des émotions. Les Caractères des passions de Marin Cureau de La Chambre par Florence Dumora, in Littératures classiques 2009/1 (N° 68), pages 161 à 175). "C’est donc une chose certaine, que le corps s’altère et se change quand l’âme s’émeut, et que celle-ci ne fait presque point d’actions qu’elle ne lui en imprime les marques, que l’on peut appeler Caractères, puisqu’ils en sont les effets, et qu’ils en portent l’image et la figure." (extrait des Charactères des Passions).







"Cureau médecin reste inspiré par la pensée par cas. Il rend compte de phénomènes paradoxaux, et d’objections possibles à ses définitions, et c’est par ces tentatives qu’il est le plus inventif. Il tente par exemple de réduire le caractère aberrant des larmes de joie par rapport à la fonction générale de la passion des larmes en en donnant une raison profonde : le langage instinctif des émotions signale par cette contradiction la surimpression temporelle propre au message délivré, à la fois la joie présente et le chagrin qui a eu lieu (et qui n’a peut-être jamais eu d’expression), chagrin que cette joie fait apparaître par surcroît en même temps qu’elle le fait cesser." (ibid. Florence Dumora)

Les Charactères des Passions de Cureau de La Chambre ont été éclipsés par Descartes et ses disciples.

Cette belle impression en petits caractères très nets et sur beau papier est une véritable impression des Elzévier d'Amsterdam selon Charles Pieters qui indique que cette édition de 1658-1663 figure au catalogue de Daniel Elzévier de 1675 et 1681 (Pieters, Annales de l'imprimerie des Elzévier, n°29). Willems indique de même que ces volumes "très bien imprimés" sortent des presses de Daniel Elzévier d'Amsterdam (n°1233). Millot fait au sujet de cette publication une remarque fort judicieuse : « On comprend très bien, dit- il, pourquoi les Elzevier ont donné tant de soins à l'impression de ces deux ouvrages de De la Chambre c'est que l'auteur était le médecin du chancelier, auquel il dédiait les Caractères des passions, et que le chancelier était le protecteur des Elzevier et un grand amateur de leurs éditions. »




Cette édition, très recherchée, comme ici complète de toutes ses parties, luxueusement reliée, faisait partie des plus belles pièces composant les riches bibliothèques de la seconde moitié du XIXe siècle.

Un exemplaire relié par Trautz-Bauzonnet figurait au Bulletin de la librairie Morgand et Fatout sous le numéro 11244 et était coté 200 francs or en décembre 1886 (avec L'Art de connaître les homme) indiqués comme "des plus beaux parmi ceux de la collection Elzévirienne". Un autre exemplaire était coté seulement 20 francs relié en veau (n°14701).

Superbe exemplaire de ce bijou bibliophilique, complet de toutes les parties, parfaitement conservé.

Prix : 3.800 euros

vendredi 19 avril 2024

Histoire naturelle de Buffon. De l'imprimerie de Crapelet. Paris, Deterveille, An VII (1798-1799). Théorie de la Terre (I et II). Discours Généraux (I) et Quadrupèdes Tomes I à VII (complet). Classée par ordre ; genres et espèces, d'après le système de Linné ; Avec les caractéristiques génériques et la nomenclature linéenne ; par René-Richard Castel, auteur du poème des Plantes. Cartonnage éditeur de l'époque plein papier à la colle rose. Exemplaire non rogné, à toutes marges, imprimé sur beau papier chiffon (la plupart des feuillets sont restés bien blancs immaculés). 74 gravures sont tirées sur papier vélin fort et en coloris d'époque au pinceau, d'une très grande fraîcheur. Bel exemplaire.


BUFFON (Georges-Louis Leclerc, comte de) | CASTEL, René-Richard

 

Histoire naturelle de Buffon. Théorie de la Terre (Tome I et II, complet). Discours Généraux (1 volume complet). Quadrupèdes (Tomes I à VII complet). Classée par ordre; genres et espèces, d'après le système de Linné ; Avec les caractéristiques génériques et la nomenclature linéenne ; par René-Richard Castel, auteur du poème des Plantes.

 

De l'imprimerie de Crapelet, A Paris, chez Deterville, An VII (1798-1799)

 

10 volumes in-18 (15 x 10 cm) de 300 à 400 pages par volumes environ (collationné complet). Avec 74 planches coloriées à l'époque à la main au pinceau (le plus souvent avec deux animaux représentés, dont 3 planches d'humains et le portrait de Buffon).



 

Cartonnage éditeur de l'époque plein papier à la colle rose. Etiquettes imprimées collées aux dos. Exemplaire non rogné, à toutes marges, imprimé sur beau papier chiffon (la plupart des feuillets sont restés bien blancs immaculés). Les gravures sont tirées sur papier vélin fort et en coloris d'époque au pinceau, d'une très grande fraîcheur et restés protégés par des serpentes de papier fin. Très bon état de l'ensemble. Quelques légères marques et usures aux cartonnages, sans aucune gravité sur la beauté de l'ensemble.

 

Nouvelle édition.

 

Il s'agit ici de la tête de série de l'Histoire naturelle de Buffon de l'édition dite Deterville publiée en 80 volumes entre 1798 et 1803. L'impression en fut commandée à Charles Crapelet (1762-1809) illustre imprimeur et les gravures ont été dessinées par De Sève ou Desève (1790-1830) et gravées par Le Villain, Racine, Jourdan, etc. Il a été fait plusieurs tirages différents dont celui-ci colorié à la main, le tirage le plus courtant étant resté en noir.









 

Dans cette courte notice nous ne pouvions montrer la totalité des 74 planches de cette série. La totalité des planches est d'une beauté qui va bien au-delà de ce que peut montrer une vulgaire photographie. Le coloris est précis, juste et net.

 

Cette série, bien que plus modeste que les grandes éditions de Buffon, reliée comme ici en cartonnage d'époque, non rognée, imprimée sur beau papier et en coloris d'époque, n'en n'est pas moins un petit bijou bibliophilique.








 

Bel exemplaire en coloris d'époque.


VENDU